Cadavres Exquis. Suite méditerranéenne au Musée Granet
Alter échos
Au Musée Granet, quinze artistes ont créé en écho pour livrer une exposition protéiforme, mais dont l’esthétique commune rend compte des réalités méditerranéennes.
Si le musée d’Aix-en-Provence, planté en plein cœur du quartier Mazarin, est lui-même une immersion en terre italienne avec ses pierres pastel, ses ifs qui se balancent dans la cour et ses grandes portes arrondies, il est surtout un lieu d’exposition remarquable. L’espace ne manque pas pour combler les mirettes du visiteur en quête d’« art-venture ».
Cadavres exquis est une ode au voyage. Les divers artistes du pourtour méditerranéen ici mis à l’honneur ont créé en écho, rendant leurs pérégrinations respectives à la fois libres et émouvantes : sculpture fascinante façon nid d’abeilles comme un big-bang recomposé vernis de fil d’or (Build from our Tallest Tales de Diane Al-Hadid), fragiles icônes orientalisées aux teintes chaleureuses, table dressée réactualisant la Cène avec des chandeliers, des verres de vin et une projection de femmes élégantes en train de déguster (Love Dinner de Lia Lapithi)…
D’une pièce à l’autre du musée, les artistes s’interpellent même si leurs objectifs créatifs ne sont pas toujours les mêmes. Ainsi, quand certains nous interrogent gravement avec une représentation mi-monstrueuse mi-amusante de fragments de visages — en référence à la fragmentation de l’identité durant la seconde guerre mondiale (Memosis d’Ilias Poulos) —, d’autres nous apaisent en transformant les images d’une récolte d’olives israéliennes en une danse gorgée de lumière (Soil Nursing de Sigalit Landau).
De Nice à Athènes, en passant par Nicosie, Beyrouth ou Florence, la contemplation est ici sublimée par les croisements entre les diverses esthétiques et les préoccupations de chacun. Et quand vient le moment de quitter les lieux, les doigts en pâte à modeler de Carmen Calvo semblent vouloir nous retenir…
Chacun, finalement, se sert du travail de l’autre pour apporter sa pierre à l’édifice. Et créer une conversation imagée sur les réalités, joyeuses ou douloureuses, de cette si diverse Méditerranée.
Pauline Puaux