Carmen Georges Bizet à l’Opéra de Marseille
Carmen nulle part
Début octobre, l’Opéra de Marseille a accueilli l’un des plus flamboyants personnages du répertoire lyrique, Carmen, de Georges Bizet. Malheureusement sans surprise ni fulgurance.
Ce qu’il y a de bien à l’Opéra, c’est qu’il est assez rare de s’y ennuyer. Et ce, malgré les défauts ou fautes de goûts, aussi imposants soient-ils. Car si le manque de subtilité au niveau des décors, des costumes et, surtout, de la mise en scène est ici à déplorer, il reste tout de même la possibilité de se raccrocher à d’autres éléments salvateurs. Il suffit en effet d’écouter, les yeux fermés, l’Orchestre et les Chœurs de l’Opéra de Marseille, majestueux et pénétrants, pour savourer l’incontestable magnificence de l’œuvre de Bizet.
C’est une distribution inégale dans les rôles-titres qui apportera le plus de frustration chez bon nombre de spectateurs, à en croire les timides applaudissements. L’interprétation de Don José par Luca Lombardo se révèle en effet bien trop éloignée du brigadier tourmenté en plein questionnement existentiel. Et ce, tant au niveau de la gestuelle du ténor, qui ne laissera jamais transparaître aucune intensité propre au personnage, que dans ses capacités vocales pour le moins décevantes.
Quant à la soprano Giuseppina Piunti, elle n’aura pas eu les ressources nécessaires pour symboliser les divers aspects, exquis et délicats, de cette figure emblématique de la liberté qu’est Carmen.
Heureusement, la somptueuse performance de la soprano Anne-Catherine Gillet dans le rôle de Micaëla aura sans conteste subjugué le public et déclenché des bravos à deux reprises. Les délicieuses Jennifer Michel et Blandine Staskiewicz, dans les rôles des deux Bohémiennes Frasquita et Mercédès, auront elles aussi réussi à faire oublier les insuffisances de certains.
Œuvre majeure et sans doute l’une des plus populaires, Carmen porte tant de promesses que la mise en scène de Nicolas Joël réalisée par Stéphane Roche ne peut que décevoir. Trop étriquée et conventionnelle, avec par exemple des indications de jeu grossières ou la présence de décors encombrants, elle ne peut en aucun cas égaler son support et encore moins tenter de le sublimer.
Laure Quenin