César, le Rhône pour mémoire / Mark Dion, un autre regard… au Musée départemental Arles antique
Mark Dion, un autre profil…
Cerise sur le gâteau de l’auguste et incontournable exposition des vestiges du Rhône à Arles, l’œuvre de Mark Dion joue avec l’addiction muséographique de l’artiste américain via un jeu de correspondances et une recherche d’« art-chéologue » contemporain.
Le buste de César nous contemple de toute sa majesté, le gracieux et émouvant captif de bronze nous met à genoux, le fessier de Neptune ne nous laisse pas de marbre… Les secrets que le Rhône avait gardés sont des trésors : un patrimoine dense présenté par une scénographie didactique bien dosée. A l’initiative de David Djaoui (aussi bon plongeur-découvreur que commissaire d’exposition), il s’enrichit encore d’un pont sous forme d’installations. Preuve que les chercheurs subaquatiques ont su, malgré la visibilité trouble et limitée sous l’eau, voir plus loin qu’un simple partage des antiquités. Au premier étage, Mark Dion explore et dispose ainsi son musée miniature, restituant le processus muséal lui-même : « Plus intéressants que les objets seraient les archéologues ! Leur vie, telle un fil conducteur, a été étudiée comme celle d’une tribu différente. » Ainsi est-on confronté à une réserve d’amphores accumulées interdite au public alors que les sous-sols recèlent des visites passionnantes. La reconstitution des bureaux énonce un parti pris critique et ironique mettant en place l’aspect maniaque et désuet. Un meuble à tiroirs conserve de superbes croquis d’identification (à voir aussi au Cargo de Nuit), sortes de narrations à partir d’éléments parfois dérisoires prélevés du limon. L’armoire, cabinet de curiosités, met sens dessus dessous les références en bousculant l’ordre des choses. Une ambiance de chapelle résonne face à la structure oblongue miroitante, métaphore du lit fluvial, qui éclaire les bris de verre classés par nuances de couleurs. Natacha Pugnet, spécialiste de l’œuvre de Mark Dion, souligne le point d’ancrage très fort sur l’authenticité, l’élaboration de collections et la réaction avec le lieu. A noter qu’Actes Sud en célèbre le dispositif, dans un catalogue à double entrée, sous forme de lab book de l’artiste et de carnet de fouilles (dirigées et illustrées par Luc Long, conservateur du DRASSM, commissaire général et scientifique de l’expo César, le Rhône pour mémoire). Le musée donne plus à réfléchir à travers le prisme des plasticiens d’aujourd’hui ; il a besoin de ce type de collaborations pour dire ce qu’il ne s’autorise pas trop.
Marika Nanquette-Quérette
César, le Rhône pour mémoire / Mark Dion, un autre regard… : jusqu’au 19/09 au Musée départemental Arles antique (Presqu’île du Cirque-Romain). Rens. 04 50 18 88 88 / www.cesar-rhone.fr
Mark Dion – Dessins : jusqu’au 15/04 au Cargo de Nuit (7 avenue Sadi Carnot, Arles). Bar à vin et tapas ouvert à partir de 18h (un verre offert aux lecteurs de Ventilo !)