Pour leur huitième édition, les Rencontres du Cinéma sud-américain mettent le cap sur le Mexique et s’invitent exceptionnellement à la Friche pour proposer la découverte, sur deux jours, d’une cinématographie terriblement vivante… (lire la suite)
Pour leur huitième édition, les Rencontres du Cinéma sud-américain mettent le cap sur le Mexique et s’invitent exceptionnellement à la Friche pour proposer la découverte, sur deux jours, d’une cinématographie terriblement vivante
Le vaste programme concocté cette année par Solidarité Provence Amérique du Sud nous conduira à découvrir — via la sélection officielle — un beau panorama de longs-métrages qui, espérons-le, viendront confirmer le dynamisme de ces dernières années. Passons sur les désormais (trop ?) classiques sections parallèles (carte blanche au FID, séances de courts…) pour nous attarder sur le très bel hommage rendu au cinéma mexicain. Une production qui tient indéniablement une place privilégiée dans l’histoire des cinématographies d’Amérique latine. Les raisons en sont variées, et restent en corrélation avec l’évolution politique même du pays. Coincé entre deux continents, c’est comme si le regard du cinéma mexicain s’était porté vers « le haut » en ce qui concerne production et star-system, et vers « le bas » question vitalité et créativité. Un entre-deux qui en fit le vivier de toutes les expérimentations et de tous les espoirs. Et ce, bien avant son célèbre âge d’or des 40’s : dès les années 10, en l’occurrence entre 1915 et 1920, le pays connaît déjà une production relativement riche pour un pays d’Amérique latine, fondant ainsi ses premiers grands studios. L’apogée sera évidemment atteinte entre 1940 et 1950, date à laquelle l’indésirable cinéaste espagnol Luis Buñuel vient s’y installer et tourner les grands films de sa période mexicaine, que votre serviteur considère, avec une parfaite subjectivité, comme sa meilleure, bien que le débat fasse rage depuis des décennies dans tous les bons salons cinéphiliques. Le Maître tourne alors ses films les plus construits, les plus solides scénaristiquement parlant, comme en témoignent L’ange exterminateur, El ou le superbe Nazarin. Cette fécondité sera, entre autres, le fruit d’une savoureuse collaboration avec le producteur Oscar Dancigers : tous deux donneront naissance à huit films qui comptent parmi les chefs d’œuvres du patrimoine mondial. La production nationale aura par la suite bien du mal à sortir d’une crise majeure débutée à l’orée des 50’s. Cependant, deux réalisateurs se démarquent aujourd’hui, par la grâce et l’engagement de leurs œuvres : Arturo Ripstein et Paul Leduc. La présence — et la présidence — de ce dernier à cette nouvelle édition du Festival en font un événement à part entière. On ne peut que féliciter l’équipe de Solidarité Provence Amérique du Sud d’avoir programmé, lors du prochain CINEvènement de la Friche (qui semble décidemment se spécialiser dans les cartes blanches), la projection de son rarissime Frida, naturaleza viva, documentaire poignant au cours duquel la peintre Frida Kahlo évoque, depuis son lit de mort, sa vie, ses aventures, ses amours et son combat. L’appréhension de l’histoire du cinéma mexicain offre un éclairage autre à la récente production nationale qui, comme en témoignent par exemple les chefs d’œuvres d’un Reygadas, souffle un vent de liberté créatrice et d’engagement profond, en totale opposition au lent formatage que laisse parfois apparaître le cinéma mondial.
Sellan
Jusqu’au 4/04 au Chambord et à la Cartonnerie (Friche la Belle de Mai).