Collectif Qubo Gas – Shimmy shimmy grass à Histoire de l'œil

Collectif Qubo Gas – Shimmy shimmy grass à Histoire de l'œil

Paradigmes artificiels

Histoire de l’œil confronte une installation multimédia à ses rayonnages. Et, histoire de vivre avec son temps, la librairie se charge encore une fois d’éduquer notre œil avec deux œuvres qui font plaisir à voir.

Expo-HDO.jpgPourquoi les arts numériques nous parlent-ils souvent de nature, comme s’ils s’excusaient de la débauche de moyen technologique à laquelle ils ont recours ?! Comme s’il fallait nous ramener à quelque chose de plus… louable. La machine, adulée dans les années 50, n’a plus la cote depuis longtemps et l’art numérique n’échappe pas au dédain de certains. Mais rappelons tout de même que l’union des arts et de la science a permis à la peinture, pour ne citer qu’elle, de sortir du classicisme. L’impression soleil levant de Claude Monet n’est rien d’autre qu’une analyse optique et scientifique, une retranscription des ondes lumineuses et colorées. L’art numérique utilise le dispositif informatique comme jadis le pinceau. Toujours est-il que depuis les Supernatures de Michel Chevalier au début des années 90, nous voyons pousser sur des écrans géants d’agréables jardins virtuels, artificiels et génératifs. Ceux de Chevalier étaient interactifs, ceux du collectif Qubo Gas sont éphémères et évolutifs. Shimmy shimmy grass ne joue pas avec vous mais avec son environnement climatique. Le dispositif immersif, une sorte d’herbier imaginaire réunissant deux cents plantes dessinées sur papier ou par ordinateur, évolue selon le taux d’humidité ou le taux d’ensoleillement de la galerie. La promiscuité du dessin et de l’informatique constitue la touche des trois artistes du collectif, comme en atteste le wall drawing. L’œuvre figée dans ses anciens médiums nous ramène vers celle en mouvement devant laquelle nous sommes passés un peu trop vite en entrant. Ce microcosme végétal, autonome et aléatoire — puisque seul le programme informatique en définit les règles — apparaît finalement comme une vanité. Il nous rappelle combien la vie est vaine puisque comme nous, ce paradis artificiel est éphémère ; il mourra avec la fin de l’exposition. Peut-être l’art apporte-il à la science une conscience qui ainsi ne ruinera pas nos âmes.

Céline Ghisleri

Collectif Qubo Gas – Shimmy shimmy grass : jusqu’au 23/12 à Histoire de l’œil (25 rue Fontange, 6e) dans le cadre des Instants vidéo.
Rens. 04 91 48 29 92 / www.histoiredeloeil.com