Trésors cachés
Excentré et (hélas) peu fréquenté, le Musée d’Art contemporain de Marseille vaut pourtant le détour. Un nouvel accrochage — sobrement intitulé Collection du [mac] — propose un parcours de travaux sélectionnés parmi son fonds d’œuvres, au sein duquel se cachent des pièces exceptionnelles.
La scénographie met en exergue les multiples possibilités et démarches des artistes exposés, rassemblées en vocabulaire, formel ou thématique.
Uovo de Claudio Parmiggiani est un œuf d’autruche traversé par deux fils reliés aux murs de la pièce. Rappelant l’abscisse et l’ordonnée, l’œuvre est un prodige de minutie, une ode à la fragilité qui laisse imaginer la rencontre de ces deux lignes au milieu exact de l’œuf, dont la coquille occulte la jonction.
Plus loin est présentée une œuvre de Van Lieshout, dont on avait pu admirer les installations à la Friche en 2013. Il s’agit d’une construction de bois à échelle humaine, sorte d’habitat réduit d’un seul tenant composé d’un banc, d’une table, de quatre murs et d’un toit, à l’intérieur duquel est insérée une lampe. Refuge ou cellule d’isolation, Study Skull est à mi-chemin entre la cabane dans les arbres et les meubles-constructions absurdes de Richard Artschwager.
Shuji Ariyoshi expose quant à lui des pieds chaussés sur socle. Business Man Shoes est une vanité contemporaine. Le business man s’est fait raccourcir. Il n’en reste que les chaussures, de facture italienne, cousues main bien sûr, qui siéent à l’homme d’avenir… Mais elles sont remplies de viande hachée. Cette allégorie de l’homme moderne n’est pas sans rappeler l’œuvre de Jan Fabre exposée dans la salle adjacente, une tête de mort recouverte de scarabées mordorés. Brillants comme des joyaux, ils sont pourtant lugubres, pour ne pas dire funestes.
Du mouvement Supports/Surfaces à Gabriel Orozco, en passant par Robert Filliou, Annette Messager et Jan Fabre, la Collection du [mac] donne à voir un échantillon de l’art contemporain qui laisse libre cours aux associations les plus variées.
On peut regretter les moniteurs vidéo éteints qui gardent leurs images secrètes. Les lieux semblent en veille eux aussi : ici, pas de bousculade ou de queue comme devant la Joconde, bien que certaines œuvres exposées se révèlent tout à fait exceptionnelles. On a la sensation grisante de visiter un musée après qu’il a fermé ses portes, de vivre le rêve d’un enfant dans un magasin de jouets de nuit.
Adèle De Keyzer
Collection du [mac] : jusqu’au 27/08 au [mac] (69 avenue d’Haïfa, 8e).
Rens. 04 91 25 01 07 / http://mac.marseille.fr
Rens. 04 91 25 01 07 / http://mac.marseille.fr