Conversations avec ma mère au Théâtre de Lenche
Ma mère, ce héros
Comme un tango effréné, c’est parfois la vie elle-même qui vous emporte jusqu’à vous en faire perdre la tête. Le temps de six Conversations avec ma mère, au Théâtre de Lenche, une « jeune » octogénaire et son fils vont se (re)trouver, formant un duo espiègle et émouvant.
2001, la crise économique sévit en Argentine. Elle touche les plus pauvres, mais aussi les classes moyennes, dont Jaime et sa mère font partie. Homme de 55 ans au mal-être profond, Jaime a peur de perdre la face. Ce cadre fraîchement licencié, piégé dans son conformisme, qui se décrit comme un « prototype de citoyen », est contraint de vendre l’appartement occupé par sa mère. Cette femme pétillante prend pourtant avec allégresse le fait d’avoir « déjà un pied dans la tombe », faisant preuve d’une générosité et d’une sagesse incommensurables. Elle surprend par sa vision moderne de la vie et aidera sa progéniture à retrouver un sens à la sienne. Témoin de son malaise, elle se livrera à lui au cours de six « conversations », tant sur son passé de femme que sur celui de mère. A son tour, il s’ouvrira à elle, ravivant la complicité qui les unissait autrefois.
C’est une histoire, leur histoire, qu’on écoute sans perdre un mot. Leurs six « conversations » sont entrecoupées par des images d’archives montrant l’ampleur de la crise. En fil conducteur, un tango, lui aussi projeté sur une toile, qu’on admire à travers deux silhouettes ne faisant qu’une.
Traitant à la fois de la pudeur et de l’amour qui unit une mère à son fils, la pièce mise en scène par Maurice Vinçon aborde des sujets tels que le choc des générations, la dissension et le rapprochement des liens familiaux, le manque constant de temps dans une société moderne qui vit à toute allure. Des sujets graves volontairement effleurés, afin de garder une légèreté qu’on retrouve tout au long de la représentation, de laquelle on ressort charmé par le tendre duo.
Estelle Sayag et Justine Lepeltier
Conversations avec ma mère : jusqu’au 28/02 au Théâtre de Lenche (4 place de Lenche, 2e).
Rens. : 04 91 91 52 22 / www.theatredelenche.info
Maurice Vinçon, le metteur en scène, se livre à chaud dès la fin de la représentation au théâtre du Lenche : « Ce qui m’a séduit ce soir est qu’on a eu un public très attentif, qui riait juste ce qu’il faut aux endroits où il faut. [… ] Chaque spectateur trouve dans le spectacle quelque chose qui le concerne dans sa propre vie. » Fier de ses comédiens, il a réussi à créer « une pièce réelle et pas simplement jouée», les deux protagonistes ayant le même âge que les personnages qu’ils incarnent.