Des nouvelles… Des Suds, à Arles

La chaleur d’un pré-printemps sort de sa cristallisation notre cœur glacé par l’ennui, et la nécessité d’une reprise de vie et d’envies gonfle à mesure que les jours rallongent. Stéphane Krasniewski, le directeur des Suds, à Arles, dresse un bilan persévérant et positif de l’année co-vidée. En 2021, l’équipe des Suds aspire à un gain en confiance de la part de l’État, indispensable à un avenir pérenne de la vie culturelle, et semble paré à proposer une édition repensée dans le respect des conditions imposées par ce dernier.

 

 

 

À quoi aurait ressemblé l’année 2020 de votre structure sans la crise sanitaire ?
À une année anniversaire, une année de fêtes et de retrouvailles, puisque c’était la vingt-cinquième édition des Suds, et que nous avions décidé d’inviter, pour la célébrer, des artistes qui ont marqué le public. Nous avons finalement pu organiser un événement en 2020 et l’émotion partagée a été intense, mais nous nous languissons du retour à la convivialité, dans le partage et la découverte.

 

Depuis le début de cette crise, avez-vous pu compter sur des soutiens physiques, psychologiques, financiers ?
Pour toutes les actions que nous avons réussi à maintenir, que cela soit des résidences d’artistes, des concerts ou de l’action culturelle, nous avons pu compter sur la fidélité des bénévoles du festival, et évidemment, des artistes et de toutes les équipes.

Le maintien des subventions des collectivités locales (Région Sud et Ville d’Arles), de l’État et des sociétés d’auteur telles que la Sacem, de certains partenaires privés, particulièrement ceux faisant partie de notre club des entreprises (Biocoop Camargue, Caisse d’Epargne Provence-Alpes-Corse, Compagnie Nationale du Rhône, Mutuelle des Services Publics, Enercoop), ainsi que le don de certains spectateurs ayant renoncé à se faire rembourser leurs billets, nous ont fortement aidé à passer cette année difficile.

Sur le plan psychologique, le fait d’être toujours en mouvement, de chercher des solutions et de se sentir soutenu a permis à l’équipe de surmonter cette épreuve, malgré les annulations et reports que nous enchaînons depuis un an maintenant…

 

Avez-vous eu la possibilité de vous réorganiser, voire de vous réinventer, afin de pouvoir maintenir ou créer certaines activités ?

Nous avons pu proposer une édition singulière du festival, en profitant des espaces libérés pour accueillir des artistes en résidence, en saisissant l’opportunité d’investir de nouveaux lieux, plus compatibles avec les exigences des protocoles sanitaires, en développant de nouveaux outils, pour rester en contact avec nos publics. Il restera des choses positives de cette période, tant sur le plan de la production que sur celui de la médiation, et nous espérons pouvoir nous appuyer sur ces transformations pour améliorer nos pratiques (et pousser plus avant notre programme éco-responsable), inventer un nouvel outil numérique, qui nous permettra de compléter notre offre de formation et nos outils pédagogiques, et augmenter notre rayonnement.
Nous avons également maintenu l’essentiel de notre programme d’activités d’éducation artistique et culturelle, conscients qu’elles étaient plus que jamais essentielles.

 

Quelles sont vos attentes quant à la considération de l’État pour le milieu culturel face à cette crise sanitaire ?
L’État doit nous faire confiance. Nous avons évidemment conscience de la difficulté à nous donner de la visibilité, alors que les évolutions de la pandémie sont imprévisibles, mais il doit pouvoir s’appuyer sur notre expertise, nos savoir-faire, pour offrir aux populations la possibilité d’activités culturelles organisées dans le respect de protocoles sanitaires adaptés à nos lieux. Bien sûr, cet accompagnement aura un coût, mais sur le plan financier, il sera moindre que de laisser l’ensemble de la filière à l’arrêt, et sur le plan sanitaire, il sera moins risqué que de laisser fleurir sans contrôle, les initiatives sauvages…

 

Arrivez-vous à trouver un quelconque aspect positif, qu’il soit personnel, organisationnel ou communautaire, à toutes les difficultés engendrées par ces handicaps répétitifs ?
Nous avons pour habitude de nous adapter ; aux évolutions du territoire, de sa sociologie, de ses recompositions politiques, d’intégrer de nouvelles esthétiques pour être en prise avec le monde contemporain. Aussi, sur le plan de l’organisation, nous avons dû intégrer au fil des éditions des consignes sécuritaires de plus en plus contraignantes qui nous ont permis de tester l’adaptabilité de notre modèle, et de nos publics. Cette crise sanitaire nous met à l’épreuve, mais notre festival est capable de proposer une alternative, en attendant que nous soyons à nouveau autorisés à danser, trinquer, chanter ensemble. Cette crise tend ainsi à montrer que ce type de festival, qui investit toute une ville, qui se déroule de dix heures à quatre heures du matin sur sept jours, a encore de beaux jours devant lui.

 

Quelles sont vos perspectives pour l’année 2021 ?
Nous allons adapter nos scènes et les passer en format assis, nous allons proposer aux autorités des protocoles d’accueil et de gestion des flux compatibles avec les préconisations qui nous serons faites, nous allons accueillir des artistes résidents en France et dans l’espace Schengen, démontrant par la même occasion que la diversité est une belle réalité de nos territoires.

 

Avez-vous mis en place des mesures spéciales pour garder le lien avec vos spectateurs tant que leur accueil physique est impossible ?

Nous avons mis en ligne des vidéos courtes que nous avions accumulées depuis plusieurs années : Les Suds, Tout Court. Nous avons également initié une série de vidéos courtes autour de certaines master classes que nous proposons pendant le festival… Et nous réfléchissons à une plateforme qui nous permette de réunir ces contenus et d’autres encore (archives vidéos, les émissions de la Radio des Suds…) pour les rendre accessibles à tous.

 

Propos recueillis par la rédaction

 

Pour en (sa)voir plus : www.suds-arles.com/fr/2021