Des nouvelles… du Nomad’Café
Dans un quotidien désormais gouverné par l’incertitude, nous donnons la parole aux forces vives de la culture, touchées de plein fouet par la crise sanitaire.
Le Nomad’Café a été contraint d’annuler intégralement l’édition annuelle du Babel Minots, qui s’annonçait grandiose. Ce temps dédié aux rencontres, concerts et rendez-vous professionnels spécialisés dans la musique jeune public, temps fort de la culture marseillaise, est le poumon de cette salle rayonnante. Se parant également de l’étiquette de productrice, la salle de musiques actuelles du troisième arrondissement a également subi l’annulation de toutes les dates de tournée de ses artistes. Julien Villatte, coordinateur des projets, nous répond.
À quoi aurait ressemblé l’année de votre structure sans la crise sanitaire ?
On peut dire que l’année 2020 devait être une année tremplin pour le Nomad’Café. Nous avions mis en place la sixième édition du festival Babel Minots, rayonnant sur l’ensemble du territoire marseillais avec trente-deux représentations gratuites de spectacles jeune public dans quinze lieux partenaires et quatre cent cinquante enfants sur scène pour les restitutions de nos actions culturelles. Malheureusement, le festival a dû être arrêté au bout de trois jours, le 14 mars, alors qu’il nous restait dix jours de festivités. Nous devions également sortir le troisième album de Temenik Electric, avec une tournée nationale et internationale et de nouveaux partenaires. Malheureusement, là encore les échéances ont été repoussées. L’album devait sortir initialement au printemps 2020, puis cet automne et aujourd’hui nous n’avons toujours pas de date à annoncer. Cette année devait nous faire franchir un cap concernant la reconnaissance de nos actions, mais une fois de plus nous allons devoir persévérer afin de pouvoir continuer et développer les projets que nous défendons.
Suite à l’arrêt brutal de vos activités provoqué par le premier confinement, avez-vous pu compter sur des soutiens physiques, psychologiques, financiers ?
Psychologiquement, le premier confinement a été très dur à encaisser pour toute l’équipe. Cela faisait des mois que nous préparions Babel Minots, nous étions mobilisés et prêts à accueillir près de dix mille minots. Cela a été un vrai coup dur d’annuler le festival au bout du troisième jour. Heureusement, nous sommes une équipe unie, et nous avons tout mis en œuvre pour garder une dynamique positive. Sur le plan financier, nous avons pu compter sur la ville de Marseille et la DRAC qui nous soutiennent dans nos actions et qui nous ont permis de rester en vie et de résister face à cette crise.
Avez-vous eu la possibilité de vous réorganiser, voire de vous réinventer, afin de pouvoir profiter un minimum des quelques mois de répit partiel qui ont précédé cette nouvelle épreuve ?
Au départ, nous voulions reporter les restitutions des actions culturelles et de la Cité des Minots en réinventant le schéma des représentations, mais le contexte sanitaire ne l’a pas permis. Nous travaillons beaucoup en lien avec les écoles, qui étaient dans la même situation que nous. Nous n’avions aucune visibilité sur nos possibilités d’action et la reprise des projets. Nous avons donc annulé les restitutions malgré le travail de six mois mené avec les enfants. De plus, à la rentrée de septembre, nous devions lancer une programmation jeune public à l’année, au Nomad’Café, mais encore une fois, les mesures sanitaires n’ont permis ni aux écoles d’emmener les élèves en sortie, ni aux lieux culturels de recevoir du public dans de bonnes conditions.
Quelles sont vos attentes quant à la considération de l’État pour le milieu culturel face à cette crise sanitaire ?
De la considération, déjà ! Nous avons vraiment l’impression d’être les laissés-pour-compte. On nous parle de mesures prises dans énormément de secteurs d’activités, qui en ont besoin bien sûr, mais le spectacle vivant reste bien souvent oublié. Heureusement, « l’année blanche » a été mise en place pour les intermittents, mais au vu de la situation, il serait peut-être nécessaire de la prolonger au-delà du 31 août 2021. On nous oblige à fermer les lieux culturels, mais alors l’État doit s’engager à ce que toutes les structures soient aidées pour maintenir tous les emplois. Ensuite, il faudra penser à comment nous pouvons rouvrir nos portes. Les lieux culturels sont trop importants au bien vivre de notre société pour rester fermés. C’est une bonne occasion d’agir pour réaffirmer que la culture est essentielle.
Arrivez-vous à trouver un quelconque aspect positif, qu’il soit personnel, organisationnel ou communautaire, à toutes les difficultés engendrées par ces handicaps répétitifs ?
L’aspect positif face à cette situation est de pouvoir prendre le temps pour construire de nouveaux projets et de réfléchir à nos façons de faire. On a le temps de discuter avec de nouveaux partenaires ou de bonifier des partenariats déjà mis en place, et également un temps pour la réflexion. On prend le temps d’échanger sur nos pratiques et nos façons de travailler. On espère juste que toutes ces démarches mèneront à pouvoir finaliser nos actions et les projets que nous sommes en train de construire.
Quel est votre sentiment quant à ce deuxième confinement ? Quelles sont vos perspectives d’avenir ?
Le plus dur avec ce deuxième confinement est de garder la même motivation. Il est très compliqué pour l’équipe de rester mobilisée sur les actions face à tant d’incertitudes. Depuis septembre, nous travaillons sur l’organisation de Babel Minots 2021, la sortie d’album de Temenik Electric et la préparation d’une programmation annuelle de spectacles musicaux jeune public. Et quand on commence à se projeter et établir un planning bien précis arrive le deuxième confinement. On a l’impression de revenir au mois de mars et de recommencer à nouveau ce que nous étions en train de mettre en place. Nous allons une nouvelle fois repenser nos façons de faire et imaginer de nouveau comment nous pouvons nous projeter, mais recommencer sans cesse devient usant, aussi bien pour l’équipe administrative que pour les artistes. Au Nomad’Café, on a l’habitude de se battre pour avancer, donc on va continuer et tout faire pour sortir de ce deuxième confinement avec de beaux projets à proposer aux publics.
Zone d’expression libre
Un peu de musique pour réchauffer les cœurs et danser à la maison :
https://youtu.be/7hlGqj3ImQI
Propos recueillis par la rédaction
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