Doom, jusqu’au 1/03 à la Galerie Buy-Sellf
Metal Machine Music
La cinquième édition des RIAM, manifestation d’art multimédia, est placée cette année sous le signe du Flux. Début à la galerie Buy-Sellf avec l’exposition Doom : l’installation à quatre mains de Cécile Babiole et Dominique Blais offre un décor son & lumière pour une étrange cérémonie d’ouverture.
Le travail de Cécile Babiole et Dominique Blais répond aux exigences « transgenres » de Circuit Court, qui organise les RIAM (Rencontres Internationales des Arts Multimédia). Chacun collabore régulièrement avec d’autres artistes, d’autres disciplines et se confronte aux nouvelles technologies. Cette transversalité des pratiques les a conduits à mêler leurs écritures dans le projet d’installation Doom à la galerie Buy-Sellf.
Plongé dans l’obscurité, la peinture et les tentures noires, l’espace d’exposition bascule dans le côté « black » du rock. Il sert de scène à un groupe d’objets posés au sol sur une moitié de la pièce. Une paire de monolithes/enceintes noires, un polyèdre/caisson de basse noir, une dizaine de moulages en faïence de coques de casque intégral, noires elles aussi, sont révélées par des éclats lumineux. La bande-son est constituée d’une playlist metal, plus particulièrement « doom-metal ». C’est l’une des formes les plus anciennes du heavy-metal, inspirée des années 70, dont la lenteur et la répétition évoquent une atmosphère de désespoir et de vide. Le tempo des morceaux est ralenti suivant la « proportion dorée » (mesure mathématique naturelle de Beauté conceptualisée dès l’Antiquité). Des ampoules cachées à l’intérieur des casques dispensent une lumière qui anime l’ensemble : leur intensité fluctue avec la musique.
Doom est un collage d’objets allégoriques répondant à un programme de déconstruction temporelle. La scénographie fonctionne comme un fondu au noir. Elle met en résonance différents imaginaires collectifs, références esthétiques et phénomènes culturels. Le polyèdre/caisson est la clé de l’ensemble, une citation en volume extraite de la célèbre gravure Melancholia I de Dürer (1514). Il concentre dans sa forme les motifs, les époques, les spleens, les pulsations. Un vestige de rite funéraire païen « fin de siècle ». Paradoxalement, le spectateur est à la fois au cœur et mis à distance, comme on peut l’être pendant un concert. L’impression est celle d’un temps sans dimension, où l’on se perd dans une boîte à musique échappée du précédent millénaire.
Luc Jeand’heur
Doom, jusqu’au 1/03 à la Galerie Buy-Sellf. Rens. www.buy-sellf.com
RIAM Flux 2008, jusqu’au 9/02 au DakiLing, à Montévidéo et à l’Embobineuse. Rens. www.riam.info/05