Delay de Etienne Rey à la Friche la Belle de Mai, dans le cadre du festival Seconde Nature

Echologie

Installation mobile d’éléments vibratoires, sonores, et lumineux en interaction les uns avec les autres, Delay crée un espace de jeux et de découvertes dans lequel le visiteur, par ses déplacements, devient expérimentateur.

Une série de pièces comme des entités, des « personnalités », préfère dire Etienne Rey, sont reliées entre elles par des fils tendus au sol et en l’air. Mais pas seulement : chaque élément, activé par une force en mouvement, comme le simple déplacement de l’air, se répercute sur les autres, suivant un principe physique de cause à effet. Les sons et les mouvements émis aux abords de l’installation sont générateurs de fréquences, captées ici et restituées sur l’ensemble de l’installation. Ainsi, le visiteur, par son passage, déclenche un système d’échos entre les différentes pièces : miroirs, bulles d’eau, aimants et lentilles de verre s’appellent et se répondent, créant un réseau d’effets de lumières, de sons et de vibrations.
A la manière des synesthésies baudelairiennes, Delay joue sur les correspondances entre les formes, les sons et les couleurs, qui renvoient à un sens phénoménal de la nature, des atomes en mouvement jusqu’à la matière. La mise en jeu de coexistences est à la base du travail de Rey, qui tend à révéler et à amplifier les infimes variations de l’environnement sur lequel notre monde est organisé, et dont les incidences varient à l’infini. Surprenante, ludique et introspective, Delay est une expérience imaginaire et sensitive. Certains visiteurs la vivent comme une contemplation nocturne, d’autres sont renvoyés à l’univers fœtal, à la manière des sensations provoquées par les concerts subaquatiques de Rodolfi.
« A l’époque, on avait l’art pour l’art, maintenant on a la technologie pour la technologie. Je veux mettre la technologie au service de l’écriture, pour raconter quelque chose », explique Rey. L’art n’est-il pas ce filtre qui propose une vision du monde ?
Une belle leçon pour l’art contemporain en quête de légitimité artistique, et souvent perçu par ses détracteurs comme une imposture. Delay renoue avec l’idée que la démarche artistique précède l’œuvre, et que l’intention de signifier postule la forme.

MB

Jusqu’au 19 à la Friche la Belle de Mai, dans le cadre du festival Seconde Nature. Rens. www.secondenature.org