La loi du marché sur la tête (1)
Plan social à la Préfecture : l’Etat licencie à peu de frais. Ou comment mettre à la rue des milliers de personnes par un simple arrêté. Les contrats aidés dans le secteur non-marchand permettent à d’innombrables structures, la plupart associatives, de réaliser leur but social. Ces irréductibles s’acharnent à développer des projets en commun, loin des idées lucratives. Sans coup de pouce public, les associations culturelles, précaires par essence, ne passeraient jamais l’hiver. L’annonce brutale de l’interruption des contrats pour 2010 a créé un vide dans un secteur qui ne cesse de manquer d’air. Ces contrats uniques d’insertion représentent leur principale solution de financement d’emplois. Exclure la signature de nouveaux contrats et pire, le renouvellement des contrats en cours, jette dans l’incertitude des milliers de personnes et met en péril les projets qu’elles avaient contribué à bâtir.
Un collectif s’est créé depuis afin de mettre en lumière cette décision inique et de lutter pour la faire changer : « L’Etat veut la peau des précaires, nous voulons la peau de la précarité » semble être leur mot d’ordre (2). La désignation de Marseille comme capitale européenne de la culture 2013 laissait pourtant croire que le secteur culturel serait encouragé, à tout le moins préservé. Pascal Neveux, le directeur du très officiel Fonds régional d’art contemporain (FRAC) détaillait pour Ventilo les qualités et faiblesses de Marseille sur le plan culturel : « Le meilleur atout est indéniablement son tissu associatif et son implication alors que les moyens sont très précaires (…). Les structures sont présentes mais les financements ne sont pas à la hauteur. Marseille, qui possède un patrimoine incroyable, n’a pas compris que la culture était un vecteur de développement économique et d’image. On vit actuellement une situation complexe : un potentiel et un gâchis énormes ! » On n’aurait pas mieux expliqué ce paradoxe qui plonge la cité phocéenne dans l’inertie la plus totale.
Et si le milieu culturel a été le premier à monter au créneau, il n’est évidemment pas le seul à pâtir de la situation. Que dire par exemple des assistants de vie scolaire, qui assurent au jour le jour et tant bien que mal la bonne marche du système éducatif ? Comment ledit système, qui s’effondre un peu plus chaque jour, peut-il survivre à ces nouvelles suppressions d’emplois ? Comme le constate Patrick Menucci dans l’entretien qu’il nous a accordé (voir p. 4), ce nouveau couperet, « typique du sarkozysme, (…) est un désastre ! » Alors qu’on embauche des flics pour éviter les règlements de compte (cf. la très médiatique visite de Brice Hortefeux à Marseille), on débauche des acteurs sociaux faisant du lien, du bien.
La France marche sur la tête, espérons qu’elle saura trouver les moyens de retomber sur ses pieds.
Victor Léo (avec CC)
Notes- Titre emprunté à la toute prochaine exposition de Vincent Perrottet à la Traverse (vernissage le 27 à 11h) [↩]
- Ledit collectif appelle d’ailleurs tous les acteurs du secteur non-marchand (culture, éducation, social, petite enfance, insertion, santé…) à un second rassemblement, ce jeudi (25) devant la Préfecture. Pour plus de renseignements, rendez-vous sur le site http://collectifpaca-emploisaides.blogspot.com[↩]