Anonymes. C’est ce que l’on retiendra (notamment la presse internationale) de cet épisode appelé anti-CPE : des gens. De plus en plus dominée par une propagande mercantile totalitaire… (lire la suite)
Nous partîmes cinq cents…
Anonymes. C’est ce que l’on retiendra (notamment la presse internationale) de cet épisode appelé anti-CPE : des gens. De plus en plus dominée par une propagande mercantile totalitaire, l’actualité politique a tendance à effacer la vie, les idées, les choix pour préférer le cocufiage d’un ministre ou les footings sexy du premier d’entre eux. Parallèlement à cette petite victoire populaire — reparaître à la télévision publique —la vraie vie a cette semaine un écho dans l’actualité culturelle. En effet, les deux principaux lieux de « spectacle vivant » marseillais — le stade Vélodrome et l’Embobineuse — entament leur rentrée de façon fracassante. Le premier en donnant à 60 000 personnes un rendez-vous excitant, que l’on n’attendait plus, la seconde en prolongeant l’expérience funambule d’organiser une aire de création en directe (voir culture). Sans filet, c’est également pour Vol de Nuits (voir brèves) l’initiative d’illustrer une traditionnelle expo photo avec des concerts de musique improvisée. Réjouissons-nous de cette vivacité parce que, Galvaudé au rang de sous-secteur du Ministère de la Culture, le terme spectacle vivant a perdu de son essence, et il n’y a souvent pas plus de vraie vie dans les représentations qu’à la une de la vie publique. Loin des codes distingués, le football et ses messes hebdomadaires a lui aussi, à Marseille, un caractère humain souvent recalé derrière les scandales financiers et le caractère « beauf » de ses comportements. Le stade comprend avant tout une masse de personnes célébrant, par du bruit, une joie d’être ensemble autour d’une émotion dont personne ne connaît l’issue. Spectacle vivant et population anonyme. En général commenté de manière définitive par ceux qui n’en retiennent que des raccourcis rapides, l’enceinte sportive du Prado héberge également de nombreuses attitudes citoyennes qui, par leur spontanéité, mériteraient de faire école. Ainsi, la grève des supporters face à la marchandisation du sport ; les gigantesques banderoles (relayées par le média TV) de soutien aux mouvements de la SNCM, de Nestlé ou encore l’affirmation d’une identité antiraciste sont autant de manifestations populaires engagées. La totalité de la population étant désormais intégrée dans un système, il serait dommage qu’une partie d’entre elle en dénigre une autre, pourtant solidaire. Cela est d’autant plus désolant lorsque cette séparation est motivée par « le bon goût » dont on connaît le caractère prétentieux et éphémère.
Texte : E.G.
Photo : Caroline Lioré