Exposition collective à caractère expressionniste à la Galerie Anna-Tschopp
Mémoires en gestes
La galerie Anna-Tschopp met en avant un choix pertinent d’artistes expressionnistes dans une exposition collective où la notion de projet et la figure humaine sont prépondérantes.
Yves Gnaegy, exigeant maître des lieux, donne un éclairage complet sur les démarches de cinq artistes, dont la majorité est autodidacte. Parmi eux, Benjamin Carbonne se focalise, réduisant sa palette aux valeurs, sur l’étude de torses : une partie de peau qui aurait autant à dire que des visages. Ceux d’Alain Crocq (médecin observateur et récepteur) explorent à l’acrylique la face morale des individus en état de crise ou d’usure. Denis Chetboune a assemblé ses volumes comme des dialogues morcelés, agençant des cires devenues bronzes uniques. Nicolas Cluzel investit la toile blanche sur laquelle ne restent que de beaux restes… Tous s’attablent au banquet des mets gestuels que goûtent les spectateurs. Quant à la seule artiste féminine, Mahé Boissel, elle a particulièrement aiguisé notre appétit. Ses isolements et abandons successifs ont permis de « construire d’un point de vue féminin un des imaginaires les plus personnels du dessin contemporain », précise le galeriste. De fortes œuvres graphiques sans titre, aux personnages en errance, mis en scène dans une sorte de tragédie épurée : de cette intensité mystérieuse naît paradoxalement l’espoir. Il y a toujours une issue, celle qui consiste à faire, défaire et refaire, à donner à voir en offrande ce qui nous malmène ! Antonin Artaud le savait : « Nul n’a jamais écrit ou peint, sculpté, modelé, construit, inventé, que pour sortir en fait de l’enfer », et Mahé Boissel trace une voie de sortie en nous y invitant.
Texte : Marika Nanquette-Querette
Illustration : Mahe Boissel
Exposition collective à caractère expressionniste : jusqu’au 11/02 à la Galerie Anna-Tschopp (197 rue Paradis, 6e). Rens. 04 91 37 70 67 / www.anna-tschopp.com