Festival CinéHorizontes : du 6 au 14/11 au Prado
La ligne bleue des Pyrénées
Pour la huitième année consécutive, le festival CinéHorizontes consacre sa programmation au meilleur du cinéma espagnol, invitant dans la cité phocéenne bon nombre de cinéastes peu représentés dans nos contrées.
C’est un fait, les institutions locales voient d’un œil de plus en plus critique le fourmillement de propositions cinématographiques qui envahissent les écrans tout au long de l’année, pour le bonheur, cependant, du cinéphile. Et CinéHorizontes lui-même, pour cette huitième édition, de se voir sucrer ses subsides de la part du Conseil Régional. Bon an mal an, ces aficionados du cinéma espagnol ont pourtant décidé de maintenir leur savoureuse programmation, s’offrant le plaisir de la présence de Sergi Lopez en parrain du cru 2009. Car malgré une production dynamique, force est de reconnaître que le gros du cinéma ibérique peine à traverser les frontières pyrénéennes. Lacune que pallie parfaitement CinéHorizontes, mettant cette année l’accent sur une thématique plutôt large : aimer autrement. L’équipe d’Horizontes del Sur s’est entre autres associée à celle, tout aussi militante, du festival Reflets, pour la projection de deux films lumineux : El nino pez – séance de rattrapage pour ce film sorti cette année en salle – et, surtout, l’avant-première d’Ander, film troublant de Roberto Caston, sorte de Brokeback mountain entre paysans taciturnes du fin fond de la Biscaye. Parmi les grands noms du cinéma espagnol, et pour rester peu ou prou sur la même thématique, nous retrouvons deux cinéastes diamétralement opposés : Ventura Pons, figure de proue du cinéma contemporain, avec Barcelona (un mapa), l’un de ses derniers opus, et le classique mais non moins déjanté Jess Franco, avec la projection de son diaboliquement sensuel Eugénie de Sade, inspiré du divin marquis, vampirisé par la beauté fascinante de Soledad Miranda. Parmi les réalisateurs présents au festival, citons, outre Roberto Caston, José Luis Cuerda pour son Los giraloses ciegos, avec en poche le Goya 2009 du meilleur scénario — l’équivalent de nos César —, et surtout la présence de Gabriel Velazquez, pour son film Amateurs, servi en clôture du Festival, touchant portrait d’une jeune fille espagnole vivant à Marseille — théâtre de la moitié du film — contrainte à repartir en Espagne après la mort de sa mère. L’équipe d’Horizontes del Sur a par ailleurs offert à Sergi Lopez, acteur hybride et raffiné, sans cesse en grand écart entre productions espagnoles et francophones, l’occasion de sélectionner lui-même deux titres peu connus parmi son impressionnante filmographie. L’acteur s’est arrêté sur El cielo abierto, grand succès hispanique de Miguel Albaladejo, ainsi que C’est ici que je vis, œuvre plus obscure de Marc Recha. Autre transgression entre structures marseillaises : le partenariat avec le Festival Films Femmes Méditerranée, récemment chroniqué dans ces colonnes, invité à présenter ici Retorno a Hansala, superbe film de la réalisatrice Chus Gutierrez, partie décrocher l’éminent Pyramide d’Or au Festival du Caire. Si l’on ajoute aux festivités l’indéniable qualité de l’équipe d’Horizontes del Sur à recevoir ses hôtes, nul doute que cette nouvelle édition laissera, comme les précédentes, un goût des plus piquants en bouche.
Emmanuel Vigne
CinéHorizontes : du 6 au 14/11 au Prado (36 avenue du Prado, 6e). Rens. 04 91 08 53 78 / www.horizontesdelsur.fr