Festival des Arts éphémères à la Mairie de secteur Maison Blanche
Arts Ephémères, le développement durable
En moins de cinq ans, le festival des Arts Ephémères s’est imposé à Marseille comme un événement majeur et incontournable de l’art contemporain. Il offre aussi l’occasion d’une balade dans le parc de Maison Blanche, où la nature est une exposition permanente à elle seule.
Chaque année, la Mairie des 9e et 10e arrondissements voit pousser en son parc des formes étranges, des bizarreries qui se confondent avec la nature flamboyante. Un cadre naturel que la main de l’homme a façonné, organisé, et où le festival vient apporter une touche de folie créatrice que le temps altère et transforme. Si l’événement semble s’installer durablement au milieu de ce désert culturel, les œuvres qui y sont exposées ne sont pas destinées à durer, elles. Lors des éditions précédentes, la majorité des artistes avaient à cœur de présenter des œuvres dont le vent, la pluie ou le soleil allaient modifier la perception de façon aléatoire. Des œuvres si éphémères que certaines disparaissaient même avant la fin du festival ! Cette année, il semble évident que les artistes sélectionnés ont pris le contre-pied du mot « éphémère » en l’abordant du côté de sa représentation plus que frontalement.
L’installation de Boris Chouvellon en est l’exemple le plus frappant. En suspendant à un arbre monumental un vieux scooter des mers recouvert de béton, c’est la périssabilité de l’objet, la gloire passagère ou le plaisir fugace qu’il procure, qui se retrouvent cloués au pilori. Quant à l’œuvre palpitante présentée par Caroline Le Méhauté, une butte de terre qui semble respirer, elle nous procure une sensation ambivalente de fascination et d’inquiétude tant elle évoque à la fois la force, créatrice comme destructrice, de la nature et son immense vulnérabilité. Une vingtaine d’artistes de tous horizons ont été invités à investir le parc. Le tout illustre à merveille ce que Michel Foucault définissait comme une hétérotopie, à savoir une localisation physique de l’utopie, la juxtaposition en un seul lieu de plusieurs espaces incompatibles dans l’espace réel. Un lieu « hors de tous les lieux », permettant de rompre avec le temps, de pénétrer dans l’imaginaire, l’illusion, la perfection. Le parc Maison Blanche, plus ancien parc à l’anglaise de la Ville, avec ses arbres centenaires et rares, est déjà une hétérotopie en lui-même. Il l’est doublement pendant trois semaines.
Laurent Jaïs