Festival des Cinémas d’Afrique du Pays d’Apt
États d’Afrique
Chaque année, la ville d’Apt accueille le formidable Festival des Cinémas d’Afrique du Pays d’Apt, qui nous offre un panorama des plus passionnants de la création cinématographique du continent africain.
Et si la question du cinéma africain résidait dans ses paradoxes même ? Nous l’avons souvent évoqué dans ces colonnes, c’est de ce continent que nous parviennent chaque année quelques-unes des plus belles pages du cinéma contemporain — sans que l’on oublie bien évidemment le grand répertoire classique, de Sembène Ousmane à Idrissa Ouedraogo, en passant par Souleymane Cissé ou Djibril Diop Mambety. Or, c’est à longueur d’articles que reste évoquée la soi-disant crise du cinéma africain, et ses peines à trouver sa voie ou le chemin des grands festivals internationaux. Pourtant, à bien y regarder, et avec des moyens certes modestes (mais nous pourrions ici dérouler les plus grands films de l’histoire à l’économie pauvre), le continent fait preuve d’une inventivité extraordinaire. Au-delà, c’est parfois libéré des contraintes d’une économie formatée que le cinéma africain renoue avec le geste premier du cinématographe, et renouvelle ainsi ses langages. On cite souvent la conséquente production nigériane et le Nollywood, ou les efforts de soutiens de certains pays (Maroc, Egypte…), mais aux quatre coins du continent existe également un cinéma dynamique et ancré dans son époque, donc universel. C’est ce que révèle sans conteste chaque année la programmation de l’excellent Festival des Cinémas d’Afrique du Pays d’Apt, qui enfonce derechef le clou lors de sa seizième édition. Avec plus de quarante films projetés, près de quinze pays représentés et une pléiade d’invités, l’équipe organisatrice nous offre un délicieux parcours cinématographique, à nul autre identique. Outre quelques opus déjà cités dans ces colonnes (Sofia de Meryem Benm’Barek, Amal de Mohamed Siam ou Retour à Bollène de Saïd Hamich), tout cinéphile un brin curieux aura l’immense plaisir de rencontrer Leïla Chaïbi et Hélène Poté pour Le Verrou, Abu Bakr Shawky pour Yomeddine ou Daoud Aoulad Syad pour Les Voix du désert. À l’instar d’autres manifestations régionales, l’équipe du festival s’associe à diverses salles de la région, pour une poignée de séances uniques, telle que celle qu’accueille la dynamique salle de Cucuron, le Cigalon, avec la venue de Bahia Bencheikh El Fegoun pour le film Fragments de rêves. Au final, un programme d’une belle richesse, à l’image d’un cinéma qui échappe — c’est sa force — aux codes internationaux imposés, en évitant le piège, fort répandu, de la pâle imitation.
Emmanuel Vigne
Festival des Cinémas d’Afrique du Pays d’Apt : du 9 au 16/11 au Cinéma Le César (Apt).
Rens. : 07 82 64 84 99 / https://africapt-festival.fr
Le programme complet du Festival des Cinémas d’Afrique du Pays d’Apt ici