Festival du Livre de la Canebière
La fureur du livre
En équilibre instable depuis la fin de l’année « Capitale », le Festival du Livre de la Canebière n’est pas mort. Il affiche au contraire une formidable envie de vivre. Alors que les obscurantismes divers et variés pointent leurs nez, il éclaire la plus fameuse artère marseillaise de toutes ses lumières, comme une bouffée d’oxygène.
« Ombres et Lumières ». Un album d’IAM ? Presque… C’est surtout le thème du sixième Festival du Livre de la Canebière. Ironie du sort, cette édition a bien failli ne jamais voir le jour. Rappelons qu’avant l’année « Capitale », le tissu associatif local faisait part de son scepticisme quant aux retombées de MP 2013 sur ses activités. Ce qui est arrivé l’an dernier à Couleurs Cactus, l’association qui porte ce festival à bout de bras, est la parfaite illustration que les craintes des « petits » de la culture n’étaient pas infondées. Suite à l’annulation au dernier moment d’une subvention, une goutte d’eau à l’échelle du budget global, c’est tout l’équilibre financier de la structure qui s’est trouvé mis à mal. C’est donc « avec les moyens du bord et grâce à l’enthousiasme des partenaires et des bénévoles » que le festival tiendra sa place cette fois encore. Paradoxalement, la richesse de la programmation, l’éclectisme des auteurs et la diversité des ateliers proposés laissent à penser que l’événement est à son apogée.
Si le gros de la manifestation se situera autour du Kiosque Léon Blum, il est conseillé de se procurer le programme pour ne pas rater certains rendez-vous hors cadre. Notamment la rencontre littéraire du vendredi à l’Anse du Pont de la Fausse Monnaie où sera présenté le recueil de nouvelles Marseille Noir, dont nous vous parlions il y a peu. Vendredi également, au Kiosque, Eddy Vaccaro du Zarmatelier présentera sa BD Young (Futuropolis), relatant l’histoire du boxeur juif tunisien Victor Young Perez, qui devint à vingt ans le plus jeune Champion du monde des poids mouches et qui mourra à Auschwitz en 1945. Autre temps fort du festival, la rencontre proposée par la Voix des Rroms avec les trois auteurs du livre Avava Ovava (Al Dante), samedi au Kiosque. Ils reviendront sur leur pèlerinage épique dans ce même camp de la mort, où des Tziganes ont eu un jour le culot de se révolter contre leurs bourreaux. Eux n’en sont jamais revenus. « Le devoir de mémoire sera mis à la lumière du devoir de réflexion sur l’histoire et du devoir d’action pour la défense de la dignité humaine. » Les auteurs seront accompagnés de musiciens qui animeront cette journée dans la joie. A noter aussi ce jour-là, la présence de Chloé Cruchaudet, dont la BD Mauvais genre (Delcourt), sur le thème du travestissement, vient d’être récompensée par le Prix du public au Festival d’Angoulême.
En tout, une quarantaine d’auteurs sont associés à la manifestation. Parmi eux, des jeunes pousses, comme Elodie Vincent, qui a participé aux ateliers d’écriture proposés toute l’année par Couleur Cactus et qui vient de sortir un premier recueil de trois nouvelles, Trois jours seulement (La Petite Edition). Elle sortira dans la foulée son premier roman, Marseille Génération : « Grâce au festival, tout s’est accéléré ; j’ai trouvé un éditeur et me voilà avec deux publications qui sortent en l’espace de quelques jours. C’est ma première rencontre avec le public… j’espère qu’il sera au rendez-vous. »
Sur le principe des ateliers, les visiteurs seront invités à s’armer d’une plume. Une initiation qui, tant chez les enfants que les adultes, pourrait éveiller des vocations… et amener d’autres éditions du festival.
Laurent Jaïs
Festival du Livre de la Canebière : du 6 au 8/06 au Square Léon Blum (Hauts de la Canebière, 1e).
Rens : www.couleurs-cactus.com