Une touche locale

La quarantième édition du Festival International de Piano de La Roque-d’Anthéron devait être un anniversaire prodigieux avec un plateau international vertigineux. Il sera finalement majoritairement français, intimiste mais pas a minima. Il n’en sera que plus rare et couru.

Dès le début des annulations des festivals de la région, René Martin, le directeur du festival, a tenu le cap de l’attente et de la réflexion. La superficie et le cadre de verdure exceptionnels du parc du Château des Florans sont un atout majeur dans la mise en place des mesures sanitaires drastiques imposées par la situation sanitaire. Pour le directeur, l’important est d’être au rendez-vous plutôt que de briller. Alors, bougies et programmation pharaonique ont été mises de côté jusqu’à l’année prochaine. L’édition 2020 peut cependant être vue comme une célébration des origines du projet : localisée essentiellement à La Roque comme à ses débuts. Du local, donc, jusqu’aux artistes, même européens, qui viennent en voiture au festival ! Les petites jauges imposées (l’auditorium passant de 2000 places à 500) et la création d’un nouveau lieu, le petit auditorium pour 150 privilégiés, rendent le tout agréablement intime.

Cette édition sera l’occasion d’affirmer la richesse, la force de proposition et la diversité de la scène musicale classique française ; en dehors des têtes d’affiches médiatiques comme les frères Capuçon ou Anne Queffélec, le public découvrira cette année des virtuoses parfois méconnus. L’intention de René Martin est de faire de ces retrouvailles musicales un moment festif et accessible au plus grand nombre, dans des registres moins puristes. Pensons à Célia Oneto Bensaid, qui mettra à l’honneur les compositions du musicien américain Philippe Glass, connu pour ses musiques de films ou ses partitions minimalistes pour le théâtre. On sortira des sentiers battus avec Looking for Beethoven, succès avignonnais et parisien de l’année dernière qui associe musique et théâtre avec un Pascal Amoyel qui vous rend accro au maestro. Le festival met à l’honneur le compositeur allemand en lui consacrant notamment deux folles journées : l’intégrale de ses sonates pour piano seront interprétées par Nicholas Angelich, Jean-Efflam Bavouzet, Nour Ayadi, Manuel Vieillard (qui nous avait charmés l’année dernière en duo avec David Salmon), Emmanuel Strosser, Claire Désert et François-Frédéric Guy. Un vent de transmission soufflera sur cette quarantième édition, et ce au-delà des masterclasses dirigées par ces derniers. La traditionnelle journée du quinze août des Ensembles en résidence est doublée de la présence de la jeune garde de pianistes et musiciens en devenir, parfois encore au conservatoire ! Les matinées sont consacrées à ces jeunes talents et au jeune public, avec des concerts gratuits pour les moins de dix-huit ans. Rémi Geniet et Audrey Vigoureux doivent aussi vous inciter à assister à ces matinales de dix heures du matin.

Le pianiste franco-israélien Gabriel Stern se produira pour la première fois à La Roque dans le cadre de la journée Liszt. Pour d’autres, ce sera un retour aux sources : on se délectera ainsi des notes de la lumineuse Fanny Azzuro, originaire d’Avignon, avec un programme Beethoven-Ravel-Rachmaninov illustrant l’étendue des talents de la soliste. Parmi le programme des soixante concerts, nous retrouverons avec bonheur Arthur Decaris, découvert en 2019 avec le Quintette Astreos. Nous aurons également le plaisir d’écouter deux quatuors essentiellement féminins, Akilone et Ardeo, ou encore les incontournables Trio Wanderer et Quatuor Modigliani, sans oublier les prestigieux David Fray, Hortense Cartier-Bresson, Abdel Rahman El Bacha ou Lise Berthaud.

Cette édition champêtre et à configuration modifiée fera figure de test quant à la tenue de grands événements dans les mois à venir. Profitons-en !

Marie Anezin

Festival International de Piano de La Roque d’Anthéron : du 1^er au 21/08.

Rens. : www.festival-piano.com

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