Rayon Primeurs

 

Il est heureux de constater que les festivals de cinéma, pour la plupart, n’ont pas posé les armes face à la fermeture des lieux culturels. Déclinant provisoirement leur programmation en ligne, ils nous offrent une bouffée d’oxygène si nécessaire en ces temps claustrophobes. C’est le cas du festival la Première Fois, qui présente, à l’instar des années précédentes, une programmation passionnante, en ligne, consacrée aux premiers films documentaires.

 

 

Il est toujours tout à fait passionnant de se plonger dans les premières œuvres de nos cinéastes de prédilection : le premier long métrage, la première pierre d’une œuvre totale, délivre souvent les pistes — narratives, visuelles, sonores, thématiques — des opus à venir. C’est là une porte ouverte à un imaginaire qui nous accompagnera au fil du temps, qui contient en son sein, parfois imperceptiblement, toute la puissance cinématographique de son créateur. À l’instar de Citizen Kane, À bout de souffle, La Balade sauvage ou Accatone, l’artiste désire tout mettre dans ce premier film, parfois trop, parfois maladroitement, mais ces œuvres possèdent sans conteste un charme tout à fait particulier. C’est aussi la curiosité du cinéphile d’y déceler les cinéastes en devenir, celles et ceux qui écriront demain les pages d’une historiographie sans cesse en mouvement.

Depuis douze ans, un rendez-vous phocéen nous offre l’occasion d’une telle découverte : le festival La Première Fois égrène en effet, au fil des éditions, une programmation tissée de premières œuvres cinématographiques, l’occasion de découvertes inédites et précieuses.

Dans le contexte que nous connaissons, l’équipe organisatrice rejoint la poignée de manifestations qui a décidé coûte que coûte de maintenir leur événement.

La douzième édition du festival aura donc bien lieu en ligne avec, au menu, une poignée de films à découvrir sans réserve, en attendant les chemins de la salle obscure. La majorité des séances, disponibles via les liens accessibles sur le site, sera ainsi suivie d’échanges avec les cinéastes, sur la chaîne YouTube du festival.

L’occasion de visionner les courts métrages de Benjamin Bucher et Agnese Làposi (Trio), de Nina Hasni (Tout n’est que façade), Laure Bioulès (La Lumière bleue) ou Pierre Mouzannar (Caméra au volant).

Au rayon long métrage, le festival développe cette année encore des propositions inédites, à l’instar de The Silhouettes d’Afsaneh Salari, qui nous plonge au cœur d’une famille afghane, Il fait nuit dehors de Léa Tonnaire et Caroline Guimbal, ou Fathallah TV – 10 ans et une révolution plus tard de Wided Zoghlami, dix années de tournage en Tunisie, au cœur des mutations d’un pays en devenir.

L’équipe des Films du Gabian nous offre l’occasion d’une rencontre (virtuelle) unique, en invitant cette année l’immense cinéaste algérien Hassen Ferhani, à qui l’on doit l’un des plus grands films de 2016, Dans ma tête un rond point. Passé par les Ateliers Varan, et sélectionné en France au FIDMarseille ou au Cinéma du Réel à Paris, le réalisateur fait partie des fers de lance de cette jeune génération de cinéastes algériens, l’une des plus belles cinématographies contemporaines. Une masterclasse lui sera également proposée en ligne, à ne manquer sous aucun prétexte !

Cette douzième édition se glisse par ailleurs dans les interstices des contraintes sanitaires, en proposant d’autres rencontres, bien réelles, celles-là, à travers les séances proposées dans la nouvelle salle des Baumettes, ou dans les établissements scolaires. Et ce tout en se payant le luxe, formidable pied de nez à la fermeture des salles, d’anticiper une future soirée de retrouvailles au cinéma, lorsque nos politiques auront enfin saisi l’enjeu vital de rouvrir ces lieux nécessaires à notre équilibre et notre ouverture sur le monde.

 

Emmanuel Vigne

 

Festival La Première Fois : du 8 au 14/03 sur la chaîne YouTube du festival.

Rens. : http://www.festival-lapremierefois.org