Festival This is (not) music
Génération F
Suite à la fermeture et à la désaffection en 1990 de la manufacture de tabac qui employait jusqu’à plus d’un millier de personnes, le quartier de la Belle de Mai est menacé de marginalisation. Les douze hectares de la Friche seront rapidement investis, avec l’idée d’en faire un lieu qui fusionnerait dimensions urbaines et culturelles. Les murs délaissés appellent les grapheurs, les salles vides attirent les musiciens. Car une telle étendue au cœur de la ville, c’est la promesse d’un espace suffisamment grand pour que la création puisse respirer, expérimenter et s’élever. Rien d’étonnant si cette année, le Cabaret Aléatoire propose This is (not) music, un festival qui croisera sans forcer musique, art et culture skate. Que l’on soit rocker, graffeur ou skateur, chacun poursuit le même désir, celui de créer un espace de liberté à l’intérieur même de la ville. Depuis près de cinquante ans, les sports de glisse, le rock (le rap, l’électro) et le graffiti ont constitué des domaines d’émancipation pour chaque nouvelle génération. Durant un mois et demi, la Friche célébrera, sur 40 000 m², le génie et les prouesses des jeunes d’hier et de demain.
L’Interview
Laurent Molinier, alias « Momo »
Entendu que ceci n’est pas (que) de la musique, nous sommes allés à la rencontre de « Momo », skateur marseillais emblématique et éminent membre du Board Spirit Marseille, à qui la communauté skate doit notamment le park de la Friche. Aujourd’hui, Laurent Molinier semble hyper fier du bowl « DIY » construit pour le festival, ainsi que de l’ouverture imminente de son skateshop à l’entrée de la Friche. Une affaire qui roule…
Quelle a été l’évolution du skate à Marseille ? Que représente cette ville pour les skaters ?
Cela va faire vingt-cinq ans que je skate, le bowl du Prado existe depuis plus de vingt ans et le skatepark de la Friche, depuis quatre ans. Il n’y a pas spécialement plus de skateurs qu’avant, mais c’est plus médiatisé, et c’est vrai aussi qu’il existe une nouvelle génération. Puisqu’il y a plein de nouveaux spots de street — la place de la mairie par exemple — depuis que la ville a été refaite, beaucoup de gens descendent pour skater à Marseille. Ju (ndlr : Julien Benoliel de Nike SB) va faire venir des Anglais, des Suédois… La ville essaye de se calquer sur le modèle barcelonais : la vie n’est pas chère, il y a une bonne ambiance et le beau temps, c’est idéal.
Quelles dimensions de l’univers du skateboard seront mises en lumière lors du festival ?
Il va y avoir l’aspect artistique et celui technique, avec d’une part toutes les expositions et d’autre part, beaucoup de démonstrations de teams de skateurs pros internationaux. Même le skate old school sera représenté lors de conférences où l’on parlera de la discipline durant les années 70, et aussi des compétitions à l’ancienne, avec sauts en hauteur, en longueur… Il manquait un bowl à la Friche, et celui qu’on va avoir pour le festival est monstrueux, vraiment difficile à skater. C’est formidable d’avoir ça dans la région.
Pourquoi l’accès au park de la Friche est-il uniquement réservé au skate ?
On a un gros fléau en France, ce sont les trottinettes. Ce sont souvent des enfants inexpérimentés, et déjà que le skatepark est étroit, ça devenait vraiment dangereux. Comme le roller auparavant, c’est une mode qui va passer, alors que le skateboard existera toujours. Avec le magasin que je vais ouvrir à l’entrée de la Friche, on reste cohérent puisqu’il sera aussi dédié au skate et aux puristes, ça ne sera pas un supermarché de la glisse.
Quels seront les temps forts du festival ? Y a-t-il un concert que tu attends en particulier ?
Deux week-ends vont être particulièrement chargés, celui de l’inauguration le 26 avril, et celui du 24 mai où on accueillera le Wu-Tang Clan. J’attends également les apéros terrasse, où il y aura un bar, du son et une rampe de skate sur le toit terrasse de 12 000 m². On a également profité de la visibilité de This is (not) music pour regrouper les événements de notre association sur le temps du festival, comme par exemple la finale de skate du championnat départemental.
Propos recueillis par Adrien Courteau-Birais
This is (not) music : du 25/04 au 9/06 à la Friche La Belle de Mai (41 rue Jobin, 3e).
Rens. thisisnotmusic.org
Les inratables de la première semaine
Cody ChesnuTT
Dans la famille néo-soul, voici le cousin un peu schizo. Tel apparaît Cody Chesnutt, coiffé de son casque de l’armée malienne (sic), fuyant le succès auquel il est pourtant promis. Ce bricoleur de génie a connu un succès planétaire grâce à la reprise de The Seed par The Roots. Souvent comparé à Marvin Gaye pour son sens de la critique sociale allié à des mélodies imparables, c’est plus à Curtis Mayfield qu’il pourrait être apparenté pour son preaching classe, d’autant qu’il est lui aussi un virtuose de la guitare. Comme au Nomad Café en fin d’année dernière, ce dealer d’hymnes mobilisateurs devrait mettre le public du Cabaret à ses pieds.
LD
> le 25 à 21h
Tommy Guerrero + Blundetto + DVNO + Dj Falcon
Avec l’inauguration à 16h du bowl DIY en parallèle du Chomp Ollie Tour, ouvert à tous, il faudra compter avec nombre de planches en l’air et chevilles sollicitées. Le soir, après le plateau embarqué de Radio Grenouille pour le premier apéro terrasse, on descendra juste en dessous pour venir écouter les compos du supergroupe et skateband monté par Tommy Guerrero, suivi entre autres par Dj Falcon, qui figure parmi les collaborateurs du nouvel album de Daft Punk et dont les bombes house ne demandent qu’à être larguées.
AV
> Le 26 à 22h
The Undertones
La musique de ces Irlandais qui ont débuté à la fin des années 70 (!) se révèle aussi efficace que celle des Buzzcocks ou des Ramones. Le groupe marque presque instantanément la mémoire collective lorsque sort Teenage Kicks, tube définitif par excellence. Si le groupe se sépare en 1983, il se reforme au début des années 2000 avec un nouveau chanteur, et deux albums à la clé. Aujourd’hui, l’objectif reste peu ou prou le même : balancer en moins de trois minutes des hymnes pop-punk qui se veulent éternels.
ACB
> Le 27 à 20h
Sound Pellegrino Thermal Team
Après les riffs d’hier viendront les beats d’aujourd’hui, avec le duo formé par Teki Latex et Orgasmic pour s’occuper de cette deuxième partition nocturne. De TTC à la formation du label Sound Pellegrino, les compères ne comptent plus les années de travail commun. Manipulant avec brio les cordes sensibles qui poussent l’humain aux plus significatives gesticulations, les tastemasters autoproclamés auront de quoi amorcer la saison chaude des soirées électroniques dans un Cabaret devenu club aérien.
AV