Au radar
Par ces chaleurs, Ventilo se devait de rafraîchir l’idée que l’on peut se faire d’un festival, qui doit trouver sa spécificité dans la multiplicité des styles qu’il aborde. De l’indé au mainstream, du concert au clubbing, vous n’y voyez pas très clair ? Suivez votre intuition.
Depuis toujours, et compte tenu de l’abondance de la proposition musicale lorsque l’été des festivals arrive (qui plus est dans le sud…), nous avons fait le choix d’écrire des papiers thématiques. Histoire de déblayer le terrain – l’agenda s’occupant du reste. Cette année, franchissons un cap de plus vers le ludisme (ou la fainéantise, au choix) et tâchons de vous donner quelques pistes, sur le terrain des musiques « actuelles », en ne mentionnant pas une seule fois un nom d’artiste. Vous verrez, tout vous semblera plus clair, quel paradoxe, une vraie gageure. Du côté des grands raouts qu’une promotion surabondante, aux alentours, n’aura pas manqué de signaler l’existence, quatre événements majeurs se distinguent. Le « Festival » de Nîmes, tout d’abord, qui jouit d’un cadre fantastique (les Arènes) mais pêche une fois encore par sa capacité à nier le fondement même d’un festival : proposer une affiche cohérente dans sa diversité (et sans faire étalage de ses inclinaisons fort naturelles à faire du fric). Lorsque, en plus de cela, la programmation affiche un degré d’intérêt proche de zéro, mieux vaut fuir en courant… Les Estivales d’Istres et les Escales du Cargo (Arles), ensuite, qui ont pour points communs, là aussi, une programmation grand public et un cadre attirant (arènes à ma gauche, théâtre antique à ma droite). Ce sont cette fois-ci des événements à taille humaine, mais qui peinent également à trouver leur singularité à force de concerts « choc », comme autant de gros coups qui s’enchaînent sans cohésion véritable : chacun y trouvera son compte… mais ira voir ailleurs s’il s’y trouve, dès le lendemain. A ce petit jeu, ce sont encore les Voix du Gaou (Six-Fours) qui s’en tirent le mieux. Au fil des ans, et bien qu’il ne soit pas exempt de balancer ici ou là un bon plateau bien racoleur, ce festival a su tirer parti d’un cadre merveilleux (la presqu’île du Gaou) pour avoir les faveurs d’un auditoire hétéroclite et très en phase avec son époque. La programmation devrait blinder quasiment tous les soirs, même si elle est sans surprises. Pour en avoir, mieux vaut donc se diriger vers les manifestations de moindre envergure : celles que l’on qualifiera « d’indé ». Premier coup de cœur de la saison estivale : le MIDI Festival (Hyères). Niché au cœur de la somptueuse Villa Noailles, haut lieu de l’architecture varoise, celui-ci est une véritable oasis pour qui n’a pas peur de se diriger vers l’inconnu, sans préjugés, à grandes enjambées, pour finir par se retrouver nez à nez avec des groupes surgis de nulle part, parfois musicalement le cul entre deux chaises, mais bien plus excitants que tous ceux dont on (ne) vous a (pas) parlé dans les précédentes lignes. Des artistes à la pointe, à la marge, hors cadres : ou comment redonner du sens au mot « découverte »… De ce côté-là, le festival Pantiero, sis sur la terrasse du Palais des Festivals de Cannes, a pris un peu d’avance. Lui aussi redéfinit une certaine idée de la pop moderne, sans frontières, tour à tour urbaine ou arty, mais a cette année clairement assimilé le potentiel offert par la nouvelle génération electro, ces « fluokids » qui se déplacent en masse dès lors qu’un artiste labellisé « French Touch V2.0 » se pointe à proximité… Pantiero devrait cette année logiquement conforter sa place – et ses goûts sûrs – dans une ville où, étrangement, règne un calme relatif. Du calme, toujours dans ce registre, vous n’en trouverez certainement pas si vous avez l’audace de pousser un peu plus loin, en Corse (Calvi On The Rocks) ou en Espagne (Fiberfib : Festival International de Bénicassim), terres naturelles d’un hédonisme à nul autre pareil. Le Fiberfib est l’exemple même de l’événement maousse costaud qui a su conjuguer indépendance (quelle affiche !) et gigantisme, cohérence et diversité. Comme quoi… Mais nul besoin de traverser la frontière pour aller faire la fiesta, de longues nuits durant. Des Plages Electroniques de Cannes (hebdomadaires et thématiques) au Worldwide Festival de Sète (le « groove » à 360° à l’ombre), d’Electromind (énorme plateau sur un seul soir et plusieurs scènes) au Tohu Bohu initié par Radio France dans la même ville de Montpellier (une semaine de rendez-vous gratuits), la qualité de l’offre proposée cet été, en matière de clubbing à ciel ouvert, est effarante. Vous pouvez y aller les yeux fermés – sans même avoir à connaître le nom des artistes en présence, et vous verrez alors plus clair – c’est désormais une évidence : la découverte reste le meilleur remède contre la routine.
Texte : PLX
Photos : Javier Sanchez