Morton Subotnick & Lillevan au GMEM le 6 février
La course aux étoiles
Tout est possible un dimanche. Mais arriver au GMEM à bout de souffle pour ne pas louper un concert de Morton Subotnick n’est pas monnaie courante.
Très mauvaise idée que de rallier Prado-Perrier à toute bombe afin d’arriver à l’heure pour Silver Apples on the Moon. L’œuvre apnéique conte les méandres de signaux sonores propulsés dans l’espace, à l’encontre des astres. Plus d’atmosphère. La nuit tombe. Morton apparaît, l’air gentiment décalé, hors du temps. Il évoque quelques anecdotes antérieures à la création : la fois où il a mis à la porte de son studio un représentant de chez Nonesuch Records (venu lui proposer un contrat), les petits moyens dont il disposait pour lancer le Tape Music Center en 62, l’apparition de la Buchla Box, Steve Reich… Un speech en forme de conférence préventive. Comme pour mieux familiariser les cobayes que nous sommes avec une époque où la musique électronique relevait de l’expérience spirituelle et novatrice, dangereuse ou salvatrice. Et plus de quarante ans après, il s’agit toujours d’un véritable trip ! Le gourou fait passer d’étranges sons issus de ses cordes vocales à travers son tableau de bord analogique et la musique tourne dans la pièce, vient à notre rencontre. Et à la vidéo intelligemment pesée par Lillevan de nous entraîner au cœur de visions, en montées et en descentes, substituant de longues périodes d’accalmies à l’urgence, intense et désordonnée. Et inversement. La Buchla cherche et marche sur la partition d’antan, musclée, mise en relief pour mieux nous glisser dans la brèche spatio-temporelle. On dirait Autechre. Habité, Morton essaie de nous dire quelque chose. Quelque chose du genre « l’humanité par la machine », et dessine ainsi les plans synthétiques de vastes déserts au-dessus desquels on ne se lasse pas de planer. Une fois éjectés du vortex, nos pieds touchent terre, on aperçoit le ciel, les nuages. Respiration.
Jordan Saïsset
Morton Subotnick & Lillevan se sont produits le 6/02 au GMEM (17 Rue Cassis, 8e), dans le cadre de la huitième édition des Rencontres Internationales des Arts Multimédias (RIAM 08)