Avancé d’un mois, le Festival de Marseille reste fidèle à son passé par ses hautes exigences et explore le présent en interrogeant notre époque, pas si formidable… (lire la suite)
Avancé d’un mois, le Festival de Marseille reste fidèle à son passé par ses hautes exigences et explore le présent en interrogeant notre époque, pas si formidable…
Les artistes de cette onzième édition questionnent notre monde chaotique, dérivant, perdu. Leurs œuvres se posent au cœur des maux de notre société, les décortiquent, les analysent, les dépassent ou les subliment. Où se place l’homme au milieu de ce déluge ? « L’humanité » serait donc le fil directeur des treize pièces présentées. Si la danse reste centrale, le festival cultive toujours la pluridisciplinarité en proposant début juin trois pièces de théâtre très marquées par l’univers musical. La musique est aussi le nerf du spectacle K 626 du chorégraphe israélien Emanuel Gat. Ce titre énigmatique renvoie à la mention portée sur la partition originale du Requiem de Mozart, restée inachevée après la mort du compositeur. Par la suite, le Requiem a été adapté et modifié. Emanuel Gat revient à l’œuvre initiale, avec tous ses manques et ses silences. Onze danseuses évoluent de solo en duo puis, par de larges mouvements d’ensemble, tissent des liens entre les silences de la composition musicale. Une ode à la pureté, à la part brute de la création, mais aussi à l’absence, aux manques. Musique et épurement transparaissent aussi dans O du chorégraphe écossais Michael Clark, qui a travaillé sur des compositions d’Igor Stravinsky. Clark s’inspire des créations de l’éternel novateur George Balanchine, poussant au plus loin le degré zéro de la danse, là où tout peut (re)-commencer. La reprise est donc ici une déprise et plus rien ne vient entraver le mouvement de la danse. D’une autre manière, avec Metapolis II, Frédéric Flamand montre que le corps, l’humain, est enfermé et disparaît dans la ville. Le chorégraphe du Ballet National de Marseille poursuit magistralement sa réflexion sur l’urbanité avec l’architecte Zaha Hadid. Objet sans limites, la ville s’est métamorphosée en mégapole. Tout n’est plus que mutations et flux accélérés sur fond de modernité. Débutée en 1996, la réflexion de Flamand autour de la ville se fait plus aiguë, modifiant les frontières entre le dedans et le dehors, définissant l’homme uniquement par le mouvement, seule force, seul lien tant dans le matériel (l’architecture) que dans l’humain. Rien n’existe à part l’homme en mouvement : telle pourrait être la conclusion de ce festival où de multiples créations seront présentées. Allons donc admirer les mouvements grandioses et silencieux de nos frères humains.
Eva D
Du 12/06 au 12/07 à la Criée, au Ballet National de Marseille (Studios et Parc Henri Fabre), au Studio Kelemenis et au Théâtre de la Sucrière. Rens. 04 91 99 02 50 / www.festivaldemarseille.com