Identité Remarquable | Charles Sinz aka Since Charles
Pop électron
Aussi bien aux manettes que sur scène, Charles Sinz a su se faire une place de choix dans le paysage musical phocéen. D’une première participation au festival Avec le Temps en tant que chargé de com’ à son actuelle apparition à l’affiche de la manifestation sous son nom d’artiste pop Since Charles, retour sur le parcours rythmé de ce couteau suisse artistique.
Charles grandit dans le petit village de Saint-Agrève, en Ardèche. Il fait de la musique depuis qu’il est môme. Il commence à jouer de la guitare à son entrée au lycée et monte ses premiers « vrais » projets de groupe lorsqu’il déménage à Grenoble pour ses études, à la petite vingtaine. Après Science Po Grenoble, ses stages de Master se tournent vers la culture, avec un premier à l’Institut Français de Londres puis un second avec le dispositif Disquaire Day. À son arrivée à Marseille, Charles intègre la coopérative Interne Externe (1), qui cherche alors un chargé de communication. Après deux ans à ce poste en bossant sur l’intégralité des projets (la SAS, Avec Le Temps, les projets perso de Fred Nevché, Martin Mey ou Iraka…), le moment semble venu : Charles Sinz se lance dans un projet musical en solo, qu’il imagine déjà depuis un long moment. Il reste chez Grand Bonheur avec une casquette toute neuve : celle de programmateur sur le festival Avec le Temps.
L’intérêt pour ce pan du métier ayant toujours été palpable, c’est tout naturellement que la transition se fait. Charles s’était d’ailleurs échauffé à la programmation à travers le collectif d’amis Sidi&co, organisateur de soirées afro électro. Il crée également il y a quatre ans un petit festival avec des amis d’enfance autour de l’émergence dans sa ville natale, Oh Plateau !, désormais bien suivi. Son attrait pour le mix et l’électro le mène à rejoindre le collectif de dj’s Tropicold.
Cette année et pour la troisième fois, Charles programme le Parcours Chanson du festival Avec le Temps pour la coopérative Grand Bonheur, avec une volonté marquée de représenter la scène marseillaise francophone, tous styles confondus. Ainsi, ce sont neuf concerts qui sont prévus du 3 au 18 mars, avec en temps fort une journée dédiée à ce parcours (cette année prévue le 11 mars) et une véritable pérégrination musicale au bon goût de festival. Une succession de concerts gratuits dans divers lieux originellement non dédiés à la diffusion musicale : l’artiste pop Antonin Appaix le 3 mars à la bibliothèque de Bonneveine, Deli Teli et (le retour de) Wilko & Ndy respectivement à la bibliothèque du Merlan et à celle de Salim-Hatubou le 4, Neñia Ira à l’Alcazar le 11, le label Bonnie’s House à la Brasserie Communale le soir même, Czesare à la Fabulerie le 15 mars, Huckleburry Finn Junior à la Bibliothèque Saint-André le 18… Une photographie large et fidèle des lieux et artistes qui font la culture actuelle de la ville et de la région.
Tel un miroir, Charles Sinz se mue en Since Charles, l’artiste pop local montant, lui-même programmé dans le « in » du festival (le 16 mars). Il a très récemment sorti le titre Des nuits de ça, annonciateur de son deuxième EP Portamento, qui sortira le 10 mars prochain. Une période intense pour l’artiste à double casquette.
D’abord porté par des influences plutôt rock, wave, cold wave, Charles découvre la culture clubbing pendant ses quelques mois de stage à Londres, avant que de se ruer sur l’achat de platines et l’apprentissage du mix. C’est sous le nom de scène Akzidance que le public du coin le découvre, derrière les machines exclusivement. « Tout comme j’avais vendu des guitares pour m’acheter des platines, j’ai vendu mes platines pour m’acheter des synthés ! De la première partie de ma vie restent les guitares et la pop song, de mon expérience de dj la musique électronique, les recherches de rythmique, l’influence house. » Adulant tout autant Mount Kimbie que Metronomy, le jeune homme crée une pop rythmée, moderne et inspirée. En solo, il accompagne des textes qu’il écrit depuis déjà longtemps après avoir parfait ses connaissances de la MAO. « J’ai pris conscience qu’on pouvait faire une chanson, tout son arrangement et en gérer la rythmique et les basses tout seul. J’ai eu envie de créer un projet où je serais 100 % décisionnaire. C’est à double tranchant car tu passes beaucoup de temps seul, mais c’est assez magique. » Bien accompagné, Charles sait trouver mix pointilleux et oreilles extérieures avisées dans un cercle proche et professionnel restreint. « J’ouvre parfois le cercle à des artistes en lesquels j’ai confiance. Fred Nevché, par exemple, m’a pas mal fait de retours sur le premier comme le deuxième EP. Dernièrement, le batteur de Superpoze, Guillaume, m’a fait des retours très utiles, c’est un percussionniste de dingue ! » Selon l’artiste, ce qui manque à son projet, c’est une véritable batterie, « qui pourrait bien arriver sur un troisième EP ! » Que ce soit en résidence ou en véritable retraite volontaire, Since Charles se plaît à composer sur des périodes d’isolement choisies, durant lesquelles les bribes de paroles écrites telles des pense-bêtes sur un carnet au quotidien s’étoffent, deviennent des mélodies vocales et habillent, en plus de la création musicale, les rythmiques nées des machines et synthés. « Je commence tout juste à être à l’aise dans mon processus créatif, au début j’y allais un peu à tâtons. Écrire des paroles, c’est un taf ! Ça ne dépend pas de l’inspiration, il faut s’y mettre ! C’est une autre manière d’approcher les choses. »
Portamento, c’est le nom qu’on donne en musique à un glissement vocal entre deux notes, et qui devient aux yeux de Charles la métaphore du passage de l’adolescence à l’âge adulte. L’EP sur le point de sortir est le premier volet d’un album en deux parties, marqué par un glissement, une rupture dans l’écriture et la composition.
Une quête de maturité qui va très bien à ce personnage aussi curieux qu’ambitieux, à tous les niveaux de ses implications culturelles. L’humilité en prime.
Lucie Ponthieux Bertram
Since Charles sera en concert le 16 mars prochain à l’Espace Julien (1er), dans le cadre du festival Avec le Temps.
Rens. : festival-avecletemps.com
Pour en (sa)voir plus : www.facebook.com/since.charles.fr
Notes
- En 2019, la Coopérative Grand Bonheur rassemble la coopérative de productions et de création musicale Interne Externe, la SAS concerts, Limitrophe Productions, le festival Avec le Temps, la compagnie Montanaro, la Pépinière et la compagnie Les Dits sont de Là, l’Édition festival et l’agence de conseil Seconde Opinion. Elle vient d’être nommée à la direction de l’Espace Julien.[↩]