Identités Remarquables | Javier Campos Martinez
Père cubain
Javier Campos Martinez est un acteur incontournable de la scène afro-cubaine phocéenne. Le Cubain d’origine a baigné dans le folklore et la tradition dès le plus jeune âge et partage sa connaissance pointue de cette musique traditionnelle depuis de nombreuses années. Percussionniste à la réputation internationale, il est à l’origine de la formation Iresongo, réunion de pointures de la scène marseillaise, à découvrir absolument.
Né au cœur du quartier populaire du Cerro à La Havane, Javier Campos Martinez a observé dès qu’il a pu marcher les cérémonies accompagnées par les tambours batá par la fenêtre, ces dernières étant interdites aux mineurs. À son entrée à l’école primaire, sa maitresse d’école lui rappelle que sa table de classe n’est pas une percussion. Tous les dimanches, il se rend chez le guitariste Paolino où se jouent des descargas (bœufs) sur la petite terrasse. Une fois rentré à la maison, il répète les rythmes entendus sur ses genoux ou son estomac. Un jour, alors qu’il se produit dans la rue sur des bidons, son cousin, ébloui par son jeu, l’emmène assister à une cérémonie religieuse Bantu.
Il faut imaginer des cours intérieures communes à plusieurs immeubles (solar) où résonnent les tambours lors de fêtes auxquelles tout le voisinage participe en jouant, en chantant ou en dansant. Il faut également comprendre le lien entre musiques et religions polythéistes. À Cuba, c’est chose courante. Les religions de la Santeria, d’Abakwa, de Palo et d’autres sont le résultat du syncrétisme entre les dieux africains et la religion catholique. Las d’essayer de convertir les esclaves au catholicisme, les colons, principalement espagnols, finissent par accepter cette fusion de saints catholiques avec des dieux transportés d’Afrique lors de la traite négrière. Des mots ou expressions yorubas font toujours partie de la langue parlée à Cuba. Chaque religion cubaine a ses propres tambours et ses propres rythmes et cérémonies. Ces religions dont les racines remontent à la nuit des temps font partie de la culture afro-cubaine.
La participation de Javier à cette cérémonie religieuse Bantu est un déclic qui marque le début de son impressionnante carrière. Il est par la suite initié aux tambours batá auprès de grands maîtres tels qu’Angel Bolano ou Regino Gimenez et devient omo aña (omo, en yoruba, c’est le fils, aña, le secret des tambours batá). Il est ensuite engagé comme professeur à l’ENA (Escuela Nacional de Artes), puis à l’ISA (Instituto Superior del Arte), où il sera membre du jury du festival Percuba aux côtés notamment de Changuito et Tata Güines. Il y reste neuf ans, jusqu’au jour où il est repéré par le flûtiste Mark Lotz qui l’invite à des masterclasses à Amsterdam et Rotterdam, où il s’installe au grand désespoir de l’ISA qui le prie de revenir enseigner à La Havane. Javier s’installe à Paris en 1990.
C’est le début de sa carrière internationale. Javier se produit en Europe et en Asie avec Omar Sosa, El Hadje N’Diaye, Amazigh Kateb, Patrice Caratini, Julien Lourau et Rumbabierta. Parallèlement, il enseigne six ans à Paris à l’École Abanico puis à l’ISAAC, et est régulièrement invité pour des masterclasses en conservatoires. Grâce à sa longue expérience et ses connaissances des musiques folkloriques et populaires cubaines, Javier est considéré comme un maître des percussions. « C’est un génie », dit de lui Felipe Cabrera, l’un des plus fameux contrebassistes cubains.
Débarqué il y a peu à Marseille, il continue à transmettre ses connaissances de la culture musicale afro-cubaine en enseignant à la Cité de la Musique les tambours batá en cours individuels et collectifs avec l’association Afara, qui organise une fois par mois les « Noche de Rumba » à l’Intermédiaire.
Auteur et compositeur, Javier fonde le groupe Iresongo à Marseille, avec un répertoire qui intègre la richesse des rythmes traditionnels cubains à des influences musicales rencontrées en Europe telles que le reggae, l’afrobeat ou le latin Jazz. Il y intègre de talentueux musiciens marseillais tels que Boris Sudres à la guitare électrique (qui a retrouvé sa pédale wah-wah délaissée depuis belle lurette), Ruben Paz au saxophone ténor, Yoandy San Martin Trujillo à la batterie et Pablo Espinosa à la basse.
Catherine Moreau
Iresongo : le 29/05 au Makeda (103 rue Ferrari, 5e), dans le cadre du Tremplin Decouverte Orizon Sud.
Rens. : 04 91 47 57 99 / www.facebook.com/lemakeda/
Pour en (sa)voir plus : www.facebook.com/Javier-Campos-Martinez-542956302452289/