HBO aime bien les séances chez le psy. Remise au goût du jour chez Les Soprano, avec les échanges mythiques entre le Docteur Jennifer Melfi et Tony Soprano, épicentre de la très belle série Tell me you love me, où trois couples transfèrent leurs problèmes de la chambre à (dé)coucher au divin divan, et désormais trame narrative de In treatment, la psychothérapie se porte bien, merci pour elle. Contrairement à l’analyste Paul Weston (campé par Gabriel Byrne), la cinquantaine séduisante, à l’altruisme et l’empathie dévorants. Car acteur passif d’une vie sociale que l’on imagine inexistante et d’une vie privée que l’on devine contrariée, Weston ne se (dé)réalise plus qu’au travers des vies rêvées des anges déchus qui hantent son cabinet. Le lundi, Laura, une infirmière au cœur d’artichaut, tente désespérément de valider le transfert amoureux qui s’est opéré avec son séduisant psychothérapeute. Le lendemain, Alex, soldat arrogant de retour d’Irak, cherche à se donner bonne conscience en légitimant ses exactions patriotiques et des réponses à la guerre qu’a déclarée « W ». Le mercredi, Sophie, une gymnaste qui s’est brisé les deux bras dans un accident, essaye de prendre son mal en patience, sans l’avoir vraiment identifié. Le jour d’après, c’est au tour de Jake et Amy de venir se déchirer à propos d’une grossesse partiellement désirée. Le vendredi, enfin, vaguement groggy après quatre jours de confidences en tous genres, Weston se rend à son tour chez sa psy, son « contrôle », dans le jargon médical, qui lui sert de soupape humaine (après crise de foi) ou, littéralement, de garde-fou. Cette petite musique, à la mélodie délicieusement névrotique, se (re)joue chaque semaine — sur la base de quarante-cinq épisodes. Soit un format original et un concept révolutionnaire, que seule HBO pouvait se permettre, et qui offre tous les soirs de la semaine, un peu comme Plus belle la vie, mais en beaucoup mieux, un nouvel épisode/une nouvelle thérapie aux accros de la chaîne câblée. Chaque épisode de trente minutes correspondant à une séance d’analyse, toujours avec les mêmes personnages et dans le même ordre, le téléspectateur fainéant ou sélectif peut regarder uniquement les épisodes de son personnage préféré — mais ce serait rater l’histoire dans son ensemble, les tenants et aboutissants d’un show gonflé, jamais gonflant. Série vertigineuse, fascinante, (im)pudique, dérangeante, soapisante et théâtrale (avec son unité de lieu et de temps), In treatment, en ce qu’elle donne à voir et entendre, est définitivement plus violente que tous les 24 et Prison break de la sphère cathodique. Bonne(s) consultation(s)…
Henri Seard