La Souris Déglinguée le 16 à l’Espace Julien

La Souris Déglinguée le 16 à l’Espace Julien

Une souris et des hommes

La mythique Souris Déglinguée est de passage à Marseille. Trente ans de rock au compteur, cette souris-là n’est jamais où on l’attend. Parcours atypique et unique pour ces vétérans du rock qui joueront à l’Espace Julien, mais aussi aux… Baumettes.

LSD.jpgIls viendront de toute la France, ces fans de La Souris Déglinguée, pour la voir sur la scène marseillaise. C’est qu’elle se fait rare : en moyenne, un concert tous les trois ans en France et des zigzags dans le sud-est asiatique, sur les bords du Mékong ou en Chine, rapport aux racines asiatiques du chanteur Tai Luc. Les premiers albums, qui clamaient sans ambiguïté Haine, haine, haine (1979) ou Banzaï (1991), sont comme des jalons brûlants posés dans l’histoire du rock français. Un groupe phare qui a chanté le macadam de Sarcelles ou des Halles, et qui rapportera ensuite d’Asie des textes qui parlent de peuples oubliés. Inclassable, éclectique, unique. Un groupe franchement rock, puisant aux racines du blues ou du rockabilly à banane sans complexe, mais capable dans le même souffle de surfer sur des rythmes jamaïcains ou jazz.
La date marseillaise fait peut-être écho au dernier opus solo du chanteur, Jukebox, mais aussi à la volonté du groupe de faire ce qui lui plaît, quand ça lui plaît. Comme de jouer pour la toute première fois en milieu pénitentiaire, gratuitement, pour les détenus. « Il s’agit de partager un moment privilégié, en jouant pour un public marginalisé, explique Jean-Gabriel Pelissier, responsable des activités d’animation de l’ASCS (1). Le but, c’est d’apporter, outre le divertissement, une sensibilisation à la culture par la musique. Les concerts se déroulent toujours de la même façon : un set d’une heure maximum, suivi d’un moment de détente et de discussion entre les détenus et le groupe. Tout se fait en collaboration et en synergie avec le service pénitentiaire, chacun dans son domaine de compétence. » Le concert sera rediffusé en partie sur Radio Grenouille. Qu’en pense Tai Luc ? « Nous, on ressort et eux restent dedans. Mais on est heureux d’apporter un bon moment à des gens privés de liberté, de leur donner une heure de loisir musical. C’est une grande première pour nous, mais on fera ce qu’on sait faire, comme d’habitude.» Quant à la rareté de leur présence, c’est un choix : « On est dans une position de vétérans. On a duré peut-être parce qu’on est un peu paresseux ! En trente ans, toutes les villes de France, tous les bleds, on les a parcourus, mais si on est toujours en vie, c’est qu’on a fait peu de concerts. Et à Marseille, ce sera la deuxième fois. C’est une ville que j’aime et c’est la première ville de France que mon père a vue en arrivant du Viêt-Nam. Je penserai à lui en faisant un tour sur le Vieux Port. » L’humilité et la pudeur de Tai Luc se ressentent aussi dans sa définition du rock : «Le rock, ça ne peut pas être domestiqué, mais on se rend compte qu’on a rien inventé. On puise sans arrêt dans un fonds musical qui existe depuis les années 30, en y apportant une touche personnelle, en posant des textes qui nous ressemblent, qui parlent de l’endroit où l’on est de passage. » Alors, alternative, la Souris ? Rires. « Si t’as un ami électricien, demande lui ce que ça veut dire ! C’est un anglicisme qui veut dire passer de l’un à l’autre ! Non, nous on est peut-être underground, souterrains, tapis dans l’ombre. Mais bien là. » Eric, qui organise les concerts, d’ajouter : « C’est un groupe qui représente peut-être une certaine pureté, ils ne se sont jamais vendus. Sur trente ans, ils ont évolué sans avoir jamais retourné leur veste. » Cas peut-être bien unique dans le paysage rock hexagonal qui mérite d’être souligné. Comme l’écrivait déjà en 1985 Gérard Bar-David dans Best, « La Souris Déglinguée n’a pas vendu son âme à la soupe popu du rock and roll. »

Bénédicte Jouve

Le 16 à l’Espace Julien avec les Warrior Kids.
NB : Tai Luc en showcase à Lollipop Music Store (Bd Théodore Turner, 6e) le 15 dès 18h.

Notes
  1. Association Socio-culturelle et Sportive du Centre Pénitentiaire de Marseille les Baumettes, présidée par Alain Troullioud.[]