La vie des autres – (Allemagne – 2h17) de Florian Henckel Von Donnersmarck avec Thomas Thieme, Martina Gedeck…
« Sublime, superbe, un grand film », disait un monsieur qui sortait de la salle, confirmant les prix et la critique univoques à une amie hésitante. « C’est grâce à des gars comme ça que le mur est tombé, c’est eux qui ont fait chuter le système ! » commentait un autre qui débattait sur le parvis… (lire la suite)
L’espion qui m’aimait
« Sublime, superbe, un grand film », disait un monsieur qui sortait de la salle, confirmant les prix et la critique univoques à une amie hésitante. « C’est grâce à des gars comme ça que le mur est tombé, c’est eux qui ont fait chuter le système ! » commentait un autre qui débattait sur le parvis. A eux deux, ils avaient bien résumé le premier film de Florian Henckel Von Donnersmark. Amoureux des grandes fresques historiques où l’esthétique des images rejoint l’attachement aux protagonistes, soyez les bienvenus. Amateurs du décorum soviétique aux ambiances minimales bleu gris, venez nombreux. L’entreprise de ce jeune cinéaste — nous plonger dans la RDA de la Stasi des années 80 — est rondement et efficacement menée : l’embarquement est immédiat pour le quotidien de Wiesler, enquêteur psychologue psychorigide. Pour cet employé zélé et convaincu du socialisme, on ne déroge pas à la règle. Le fait même de remettre en question le système, le temps d’une blague ou pire d’une conversation chuchotée, est un faux-pas à signaler car il en va de la survie dudit système et de ses certitudes. C’est cette même crainte de la conspiration réactionnaire qui va le mener à douter de Georg Dreyman, un metteur en scène d’envergure. Bref, le quotidien de l’espion modèle serait simple s’il ne s’en tenait qu’à sa fonction. Notre officier, un brin raide mais finalement sympathique, doit en effet mélanger la rigueur, les sarcasmes et couvrir les pratiques pas très socialistes de sa hiérarchie. Partagé entre l’implacable machine d’état qui traque ses détracteurs et la cause qui lui apparaît sur le tard, Wiesler choisit son camp : la liberté. Ce petit air héroïco anti-coco irrite d’ailleurs un peu et l’on en veut presque au brio de la sobre mise en scène et à la perfection des interprètes qui, à part l’actrice qui joue l’actrice, réussissent à nous entraîner au cœur de ce polar DDR et à recréer les tensions du passé malgré un scénario hollywoodien et MacCarthiste. En découvrant qu’à l’Est, tous sont des monstres corrompus, Wiesler le robot devient humain et rejoint les héros intelligents et courageux. Et pourtant, en bon film de genre, La vie des autres procure surtout un énorme plaisir… Occidental.
Emmanuel Germond