Matières grises
Un an a passé depuis l’ouverture de l’Atelier 72. L’occasion de convier tous les résidents pour une exposition à l’image d’un lieu aux multiples facettes.
C’est un écrin de métal, de brique et de bois où rien ne se perd et tout se transforme. Ici, la déambulation laisse s’exprimer l’imagination et fait travailler la matière… grise.
Le temps de l’exposition, le rez-de-chaussée est notamment occupé par Marthe Le Basque, « l’anti-Soulage ». Ses gravures sur papier blanc nécessitent plusieurs lectures pour deviner que des bouts de fibres musculaires agglomérés se cachent derrière ses tableaux diaphanes. « Ceci n’est pas un corps », nous dirait Magritte. Pourquoi alors ce besoin de toucher l’œuvre ?
Chez Cyril Carret, c’est le changement d’angle de vue qui devient impérieux. L’œil est désarçonné par une double impression de plat et de relief dans les photographies de l’artiste, fruit d’un long et minutieux travail sur la matière et la lumière. Dans son cabinet de curiosités, le banal est transfiguré : l’animal et le végétal inversent leurs rôles, quand ce n’est pas l’industriel qui sort du pot de terre ou l’objet ménager qui coiffe le mannequin.
Les apparences sont également trompeuses dans les œuvres de Guillaume Chamahian, dont le maître-mot pourrait être « distance ». De photographies en petits formats à un poster géant en passant par une citation au microscope, différentes distances sont nécessaires pour approcher le miroir social faussement humoristique et véritablement sombre de ses photographies.
Entre une fresque murale multipliant les références (comics, manga…) et des illustrations de personnages isolés dans une jungle urbaine densifiée à l’encre de Chine, le travail de l’autodidacte guatémaltèque Sebastian Sarti évoque souvent avec poésie la violence en Amérique Centrale.
D’environnement social, il en est aussi question dans le travail de Mahn Kloix. Le graphiste a retravaillé puis reproduit en grand format des photos de contestataires publiées dans le Time Magazine, avant de les afficher dans les villes concernées et rapprocher ainsi objets et sujets dans un véritable art sociétal.
Pénétrer dans l’Atelier 72, c’est (s’)ouvrir une porte sur le monde.
Guillaume Arias
Un an déjà : jusqu’au 12/10 à l’Atelier 72 (8 rue Vian, 6e).
Rens. www.facebook.com/atelier.72.watt