Le dahlia noir – (USA/Allemagne – 2h) de Brian De Palma avec Josh Hartnett, Scarlett Johansson…
Los Angeles, années 40, une starlette, Betty Short, est retrouvée atrocement mutilée, façon découpeur de Nip/Tuck. Cette découverte macabre met tout un pays en émoi et la police… (lire la suite)
Mission (vraiment) impossible
Los Angeles, années 40, une starlette, Betty Short, est retrouvée atrocement mutilée, façon découpeur de Nip/Tuck. Cette découverte macabre met tout un pays en émoi et la police californienne sur les dents, chargée de faire la lumière sur ce crime ignoble qui tient en haleine (pas vraiment fraîche) l’Amérique mid-forties. Si cette histoire vous parle, c’est que vous avez déjà entendu parler de cet atroce fait divers ou, encore mieux, lu Le Dahlia Noir, chef d’œuvre de James Ellroy — polar absolu et modèle inégalé — que Brian De Palma vient d’adapter pour les salles obscures. Sur le papier, l’attelage Ellroy/De Palma s’annonçait explosif, le résultat à l’écran a malheureusement tout du pétard mouillé. En effet, le dernier opus du réalisateur italo-américain, dont on n’attend plus grand-chose depuis L’impasse, constitue un véritable bréviaire de ce qu’il ne faut surtout pas faire au cinéma avec un roman culte, noir et choral. Si la reconstitution de la Cité des Anges millésimées années 40 n’a rien à envier à celle de L.A. Confidential, les personnages semblent par contre tout droit sortis de Dick Tracy, entre caricatures et (gang des) pastiches. Engoncés dans leurs costumes d’époque et parfaitement peignés, Josh Hartnett, Scarlett Johannson ou Hilary Swank sont totalement à côté de la plaque, figés ou désorientés, dans l’emphase ou l’introversion, ne semblant pas comprendre ce qu’ils disent ou ce qu’il se passe dans le film, à l’instar du spectateur, ce qui est plutôt ennuyeux. A la décharge des acteurs, il faut quand même préciser que le scénario est plus opaque encore que celui du Grand Sommeil, pas un mince exploit, le grand œuvre d’Howard Hawks, la référence ultime de De Palma. Aussi, quelle joie de voir renaître à l’écran, et c’est bien la seule bonne nouvelle de cette adaptation constipée et de ce casting glamour (du genou), l’actrice canadienne Mia Kirshner que les plus cinéphiles d’entre vous avaient découverte dans Exotica d’Atom Egoyan. Dans le rôle de Betty Short, le cadavre exquis d’Hollywood, la vingt-cinquième image de De Palma, elle crève l’écran, magnétique, sensuelle et bouleversante. Figure centrale, invisible et spectrale, elle rend hommage avec grâce et magie à toutes les Betty Page et Vivian Leigh de la planète tout en convoquant les ectoplasmes de deux célèbres Laura du septième Art, du deuil et du hors-champ, celles d’Otto Preminger et David Lynch. Mia/Betty ou la béquille d’un film définitivement boiteux ? On se console comme on peut lorsque la montagne d’Ellroy accouche d’une souris depalmienne…
Henri Seard