Le Dernier Roi d’Ecosse – (USA – 2h05) de Kevin MacDonald avec Forest Whitaker, James MacAvoy, Gillian Anderson…
On l’a peut-être déjà dit dans ces pages, mais après tout, comme dirait ma mère (ou Henri Seard, je sais plus, bref), faut pas rechigner sur le rabâchage, ça donne de la contenance : faire un film politique ne consiste… (lire la suite)
Echec au roi
On l’a peut-être déjà dit dans ces pages, mais après tout, comme dirait ma mère (ou Henri Seard, je sais plus, bref), faut pas rechigner sur le rabâchage, ça donne de la contenance : faire un film politique ne consiste pas à faire un film avec de la politique. C’est même très différent. Or, de ce point de vue, Le Dernier Roi d’Ecosse va droit dans le mur, ce qui est plutôt regrettable tant le film parvient parfois à distiller un authentique sentiment de fascination. Ce qui est gênant chez Kevin MacDonald, ce n’est pas tant sa volonté de masquer chaque temps mort narratif par un habile talent de monteur, mais plutôt son caractère ethnocentriste. Il y a bien chez lui une louable tentative de bien faire, en montrant dans des plans saturés de lumière blanche la réalité d’un continent qui souffre ; mais la question (fondamentale) du regard est éludée. Dans Le Dernier Roi d’Ecosse, l’œil du cinéaste est absent ; tout est délégué au pauvre Dr Carrigan, spectateur occidental dépassé par ce territoire qu’il ignore. Car il ne suffit pas de jouer au foot avec des paysans pour comprendre les ressorts d’un drame aussi complexe que celui de l’Ouganda. Au-dessus de tout cela, il y a pourtant Forest Whitaker, monstre de cinéma, acteur physique, fragile et fascinant. A lui seul, il parvient à retranscrire un peu de ce mystère qui définitivement nous échappe, celui d’Idi Amin Dada. Sa délicatesse pataude, son regard terrifié et terrifiant, sa masse-aimant qui attire irrésistiblement la caméra reste finalement la seule image qui survit à ce rendez-vous manqué du Dernier Roi d’Ecosse.
Romain Carlioz