Le Festival d’Art lyrique d’Aix-en-Provence
Passions partagées
Pour son soixante-dixième anniversaire, le Festival d’Art lyrique d’Aix-en-Provence célèbre l’amour avec une programmation d’exception.
Si le Festival d’Aix souffle ses soixante-dix bougies, il n’a jamais paru si jeune. Sans doute grâce à l’impulsion donnée par Bernard Foccroulle depuis son arrivée en 2007, qui a su ouvrir les scènes aixoises aux audaces les plus contemporaines en termes de scénographie et de mise en scène, et, surtout, enrichir l’évènement de concerts et de propositions participatives, réellement ouvertes sur tous les publics, faisant de l’accessibilité un credo qu’il est nécessaire de saluer.
En témoigne l’opéra Orfeo & Majnun, qui mêlera professionnels et amateurs dans une grande fresque née de la rencontre entre le mythe d’Orphée et d’Euridice et une légende arabe. Donné gratuitement sur le cours Mirabeau, la voûte céleste pour témoin, l’opéra conçu par Airan Berg pour le Festival devrait constituer l’un des moments forts de la saison lyrique et de l’année MP2018 – Quel Amour !.
L’éternel sujet du sentiment amoureux est d’ailleurs l’un des fils conducteurs de cette soixante-dixième édition. Ainsi de La Flûte enchantée, étonnant opéra dans lequel Mozart mêle les styles (conte fantastique, fable philosophique, comédie…) pour narrer les amours contrariées de Tamino et Pamina. On peut compter sur Simon McBurney pour perpétuer la tradition mozartienne de la manifestation et marcher sur les pas du maître Amadeus, en agrémentant sa mise en scène d’une certaine dose de technologie pour mieux surprendre le public.
D’amour et de funeste destin, il sera également question avec le sublime Didon et Énée de Purcell. Exceptionnellement enrichi d’un prologue de Maylis de Kerangal, le chef-d’œuvre lyrique inspiré par L’Énéïde de Virgile saura certainement retranscrire toute l’acuité du récit mythologique — l’autre fil rouge du Festival — à refléter les violences et les passions des sociétés contemporaines.
Des allers-retours entre passé et présent que l’on retrouve dans l’opéra de chambre Ariane à Naxos de Richard Strauss, mis en scène par l’enfant prodige du théâtre anglais Katie Mitchell et dirigé par le chef d’orchestre Marc Albrecht. Un double hommage à Molière et Mozart (décidément…), confrontant deux facettes de la féminité (la fidèle Ariane et la frivole Zerbinetta) avec un point de vue masculin et dans un monde encore très patriarcal… L’insaisissable héroïne possédée de L’Ange de feu devra quant à elle affronter la vindicte des hommes, enclins à condamner tout ce qui relève de « l’extraordinaire », a fortiori quand cela émane du sexe dit « faible ». L’éclatant opéra de Prokofiev sera porté sur scène par le non moins brillant Mariusz Trelinski, qui devrait nous transporter dans un univers kafkaïen seyant à merveille à cette histoire d’amour surréaliste.
Enfin, Éric Oberdorff nous plongera dans la fresque de chambre imaginée par le poète islandais Sjón et le compositeur tchèque Ondrej Adámek, Seven Stones, suivant le parcours éperdu d’un homme coupable du meurtre de la femme qu’il aimait, à la recherche du pardon.
Au-delà de ces grands moments lyriques en perspective, le festival se décline aussi en une série de concerts à petits prix. Et s’il ne fallait en retenir qu’un, on se précipiterait sur celui consacré aux Voies de la Méditerranée, une soirée de lectures et de musiques au profit de SOS Méditerranée réunissant notamment Rokia Traoré, Moneim Adwan, Anne Alvaro et la très rare Isabelle Adjani. À votre bon cœur !
CC
Festival international d’Art lyrique : du 4 au 24/07 à Aix-en-Provence.
Rens. : 04 42 17 34 34 / www.festival-aix.com
Le programme complet du Festival international d’Art lyrique d’Aix ici