Les Escapades au Théâtre Durance

Rubrique Musique , le mercredi 07 Juin 2023 dans Ventilo n° 484

Transes musicales

La désormais Scène Nationale qu’est le Théâtre Durance de Château-Arnoux n’a plus à prouver sa capacité à offrir aux sûrs d’oreille des Escapades sonores défricheuses (et gratuites !) au cœur des Alpes-de-Haute-Provence. À l’instar de sa programmation théâtrale, l’affiche musicale du week-end s’avère aussi variée qu’exigeante.

Échappées chaloupées à chaque coup, les Escapades épatent de persistance tant en gratuité qu’en singularité. Le festival de la Scène Nationale de Château-Arnoux propose, malgré des grands écarts stylistiques, une inébranlable qualité de programmation, renseignée et très contemporaine. Non sans évoquer par cet esprit avant-gardiste d’intimes Transmusicales, on sent un goût certain et de bon ton pour le dansant, en cet été naissant, de la part de l’organisation. Difficilement classables, artistes et styles s’accumulent pour un plaisir auditif au goût du jour.

Mise en jambes en douceur, la première soirée sera rythmée par la folk rétro parfois pop du groupe allemand Black Sea Dahu, emmené par la voix singulière, presque masculine, de sa chanteuse Janine Cathrein. Grand écart stylistique, la très remarquée formation Ukandanz, qui mêle le jazz fusion d’un quartet électrisé chatouillant le rock prog à la prestance du chanteur éthiopien Asnake Guebreyes, pour un ensemble festif et très « mélomaniaque ». Dernier délicieux bond de la soirée, la prestation des (véritables) chefs de tribus (initialement) rivales de Black Indians de La Nouvelle-Orléans ayant décidé de monter un groupe ensemble. Non, sans blague ! Le résultat, c’est évidemment la crème de tout ce qui fait du jazz New Orleans l’une des branches les plus festives et culturellement riches du monde de la musique : une expertise musicale teintée de tout ce que les influences carnavalesques et décomplexées de Louisiane se sont vues offrir de hip-hop, de funk ou d’électro par l’histoire.

La seconde soirée, dans le même esprit crescendo, offrira à entendre le très original instrumentarium des poétesses tribales du quartet Bacchantes, avant de découvrir les ovnis de Puluup, qui dépoussièrent à coups de boucles électro post folk le folklore scandinave. Pour finir (en beauté), le très festif Electrik GEM (Grand Ensemble de Méditerranée) secouera ensemble traditionnel et contemporain, sous la direction musicale experte de Gregory Dargent.

Un seul mot : respect.

Lucie Ponthieux Bertram