Les expositions Brouhaha, Copain et Les Friches Rio Tinto à l’Estaque, Marseille au FRAC PACA
Plateaux repus
Trois nouvelles expositions, aux esthétiques multiples et aux propos disparates, habillent les murs du FRAC Provence-Alpes-Côte d’Azur depuis la mi-octobre. Focus.
Au Plateau 1, on découvre la proposition monographique de Jean-Christophe Norman, Brouhaha, qui fait du texte son matériau de base, en réécrivant entièrement Ulysse de James Joyce sur vingt-quatre villes. Ce projet au long cours (dix ans) s’empare d’un ouvrage-monde, épique, pour venir questionner sa symbolique. Dans les deux compositions de grande échelle, une multitude de pages accrochées les unes à côté des autres viennent raconter une autre histoire, celle d’un paysage marin avec sa propre vie. Sous la matière colorée, on devine le texte imprimé qui a servi de support. Les bookscapes font surgir leurs images flamboyantes au détour d’une page, comme des carnets de voyage sous forme de palimpseste. Jean-Christophe Norman pousse la désacralisation de l’objet-livre jusqu’à le recouvrir d’encre et de graphite. Même ainsi recouvert, le texte apparaît encore, comme protégé, présenté dans un écrin de verre. Le film Brouhaha vient clore la visite. On y voit l’artiste réduire en poussière l’ouvrage, en le frottant contre les murs de la ville de Marseille, imprimant l’environnement dans l’œuvre littéraire. À moins que ce ne soit l’inverse.
Au Plateau 2, on découvre l’exposition Copain des artistes suisses Gerda Steiner et Jöra Lenzlinger. Il s’agit d’une installation, un surgissement d’une abondance de pain, organisé autour d’un autel, présentant toutes les divinités qui lui sont associées. Sur d’immenses tables blanches, le public peut découvrir le pain sous toutes ses formes et sa diversité. On y reconnaîtra des pains traditionnels ou un peu plus élaborés (les célèbres navettes marseillaises, par exemple), mais aussi des pains inventés. La scénographie immersive de l’exposition permet à tout un chacun de préparer la pâte, observer la cuisson, déguster le pain réalisé et même de l’observer au microscope.
Enfin, au Plateau expérimental, Voyons Voir présente, dans le cadre du festival Photo Marseille, la proposition de Lara Almarcegui Les Friches Rio Tinto à l’Estaque, Marseille, dernier des guides des terrains vagues produits par l’artiste. En effet, la photographe travaille sur des zones de transition ou abandonnées. À l’Estaque, situées au-dessus du port de la Lave, avec une vue époustouflante sur la mer, ces friches ont été, depuis la fin du XIXe siècle, le site d’intenses activités industrielles avant leur cessation au début des années 2000. En cours de dépollution, ces friches sont à l’heure actuelle l’objet de discussions quant à leur futur développement. Le guide est mis à disposition du public, qui peut ainsi disposer d’un précieux témoignage sur l’un des lieux les plus méconnus de Marseille.
Isabelle Rainaldi
Brouhaha de Jean-Christophe Norman, Copain de Gerda Steiner et Jöra Lenzlinger et Les Friches Rio Tinto à l’Estaque, Marseille de Lara Almarcegui : jusqu’au 16/01/2022 au FRAC PACA (20 boulevard de Dunkerque, 2e).
Rens. : 04 91 91 27 55 / www.frac-provence-alpes-cotedazur.org