Leur horizon d’être
La vingt-deuxième édition des Instants Vidéo se démarque cette année encore à bien des niveaux : par son ancrage local (une dizaine de lieux et de structures participants) et son ouverture sur l’international (quarante-deux pays représentés), par la richesse de la programmation où la vidéo se déploie de façon multiforme et enfin par la place accordée au dialogue et aux rencontres avec les artistes.
Après avoir voyagé et participé en mai à la création du premier festival d’art vidéo palestinien, l’équipe des Instants Vidéo déploie actuellement sa manifestation — qui se situe au carrefour de différentes dynamiques, passées, présentes et à venir — à Marseille avant de reprendre son périple vers la Pologne, la Palestine, la Syrie et enfin l’Egypte. En ligne de mire, celle de l’horizon justement, une question féconde traversant l’ensemble des événements proposés : « Avez-vous vu l’horizon récemment ? ». Si l’horizon est la limite de ce que l’on peut observer, les multiples propositions artistiques — une vingtaine d’installations, une dizaine de performances, des centaines de films — concourent à un décentrage de nos points de vue, à une fluctuation des repères. L’installation L’autre côté (Sophie-Charlotte Gautier) s’inscrit ainsi de façon renversante dans l’espace public, tandis qu’Amexica Skin (collectif Gigacircus) interroge la frontière mexicano-américaine… Convoquer l’horizon, c’est aussi un appel à la construction du regard sur le visible et soulignons en ce sens la très belle exposition d’Anne Penders, L’hiver d’ailleurs, ainsi que The reflecting Pool de Bill Viola, qui sculpte l’espace par l’exploration du temps.
Temps fort du festival cette semaine à la Friche, les Rencontres poétroniques questionneront — via des projections, des performances et des discussions avec les artistes — des thématiques aussi variées que le corps, la création vidéo asiatique, la mémoire, la voix ou encore les vanités (en écho aux installations vidéos présentées à la Galerie Où).
L’université expérimentale de Vincennes et Gilles Deleuze jouent un rôle singulier pour les Instants Vidéo. En témoignent la projection de Facs of life de Sylvia Maglioni et Graeme Thomson (le 15), puis cinq exp(l)ositions autour du film, pensées comme une tentative de dispersion des éléments filmiques, plastiques et performatifs. Une façon pour les artistes de (re)mettre en perspective la dynamique de la démarche deleuzienne : transformer les formes de l’art en formes de vie collective, découper le temps et peupler l’espace de telle sorte qu’une forme singulière de partage du monde peut être éprouvée comme un avenir possible. Un horizon.
Texte : Elodie Guida
Photo : Amexica Skin du collectif Gigacircus
Les Instants Vidéo : jusqu’au 19/12 dans divers lieux de la ville et des environs (à Martigues du 24 au 28/11 et à Port-de-Bouc les 18 et 27).
Rens. 04 95 04 96 24 / www.instantsvideo.com