Il ne reste plus que quelques jours pour aller voir l’exposition collective, qui réunit cinq artistes partis en résidence à Berlin. A l’origine, le dynamisme de l’association SMP, désireuse d’œuvrer ailleurs que sur la scène locale. A l’arrivée ? Des propositions stimulantes, qui sollicitent l’imagination et la réflexion dans de multiples directions.
En partenariat avec NIK (une association berlinoise), SMP (Sol Mur Plafond) a mis en place « Visite ma tente », un espace de rencontres et de travail implanté dans un quartier populaire de Berlin, qui propose une résidence et un lieu d’exposition. Sylvie Reno, David Giancatarina, Eric Watt, Bettina Samson et Mijares se sont rendus dans ce lieu depuis sa création en 2005 et nous font découvrir ici une partie de leur travail, réalisé sur place ou stimulé par cette ouverture berlinoise. Toutes les œuvres présentées témoignent de la fertilité de ce voyage, mais arrêtons nous plus en détail sur celles de Sylvie Reno et Pascale Mijares.
Ceux qui connaissent les multiples constructions en bois ondulé de Sylvie Reno[1] auront l’occasion d’en découvrir un autre aspect, commencé il y a deux ans et en constante évolution depuis. Des Objets trouvés dans les rues de Berlin sont assemblés au mur selon leur valeur chromatique, et chargés ainsi d’une valeur esthétique. Mais pas seulement. Car la « tentative de revalorisation du monde »[2] ne peut se suffire de cette étonnante beauté. L’artiste nous invite à porter attention aux détails (les usages passés de ces objets, leurs charges sociologiques, etc.) et à l’ensemble — ce qui ne peut exister qu’à travers la grille d’un regard, d’une attention. L’agencement des objets semble prendre la forme d’une sorte de schéma, d’arbre généalogique. S’agit-il d’une cartographie esthétique, psychologique, sociale ? La force de cette proposition est justement d’ouvrir un espace où différentes lectures sont possibles.
Une ouverture présente également dans l’œuvre de Mijares, qui livre une installation principalement composée d’une multitude de bouchons en liège récupérés grâce à une collecte. Entreprise de réinsertion, de détournement, de recyclage ? Une grande quantité est entassée dans une armoire en bois qui ne peut visiblement les contenir tous. Ils débordent par le haut et surtout par le bas, par ce tiroir entrouvert, pour se déverser sur une partie du sol. L’imbrication des bouchons qui grouillent par terre contraste vivement avec la stature verticale, massive et imposante de l’armoire. Désirent-ils mener une autre vie après avoir été dépossédés de leur fonction première ? Mijares restitue à ces résidus de bouteille une nouvelle valeur d’usage, et le choix de l’armoire n’est là encore pas anodin. Si elle participe à la dynamique visuelle de l’ensemble, elle nous incite également à porter attention aux différents objets qui peuvent être construits à partir d’un même matériau, le bois, et par la même aux usages auxquels ils sont ou peuvent être associés. Un encouragement à inventer soi-même d’autres usages ?
Texte : Elodie Guida
Photo : Thomas Florens
Jusqu’au 10/11 à la galerie SMP (31 rue Consolat, 1er).
Rens. 04 91 64 74 46 / www.s-m-p.org
Notes
[1] Une exposition, Fines lames, lui est consacrée à la Galerie Athanor jusqu’au 24 novembre.
[2] Partie du titre initial de la proposition.