Kiki Smith - Blue Moon III © Tom Barratt

Les Papesses à la Collection Lambert et au Palais des Papes (Avignon)

 

Habemus Pap’art

Camille Claudel, Louise Bourgeois, Jana Sterbak, Berlinde de Bruyckere et Kiki Smith : ces cinq artistes majeures de l’art moderne et contemporain sont réunies au sein d’une même et exceptionnelle exposition à Avignon. Près de 300 œuvres présentées sur deux sites : le Palais des Papes et la Collection Lambert.

L’exposition fait référence au mythe de Jeanne La Papesse qui, avant l’arrivée des Papes dans la ville provençale, fut élue pape et le resta jusqu’à la découverte de sa grossesse. Son enfant périra comme elle. Une légende qui ne pouvait que parler à ces cinq artistes.
Pour Erik de Mezil (directeur de la Collection Lambert et commissaire), il s’agissait de mettre en regard cinq femmes, cinq artistes que l’on peut considérer comme « les papesses de l’art moderne et contemporain ». Ces femmes aux destins d’exception ont en commun la puissance de leur démarche artistique. Toutes sculpteurs, un art exigeant et difficile, elles captent la beauté mais aussi la fêlure, émeuvent par la force de leur œuvre. Parmi elles, Camille Claudel (1), dont les œuvres — enrichies de documents d’époque bouleversants — dégagent une formidable sensibilité, mais aussi Louise Bourgeois, immense plasticienne française qui vécut toute sa vie à New York et dont le rapport au corps et à la matière subjugue depuis sa reconnaissance tardive dans les années 1980, alors qu’elle est septuagénaire. Les trois autres protagonistes de cette histoire sont bien vivantes, toutes nées entre 1954 et 1964. L’Américaine Kiki Smith expose pour la première fois en France un univers de contes et légendes, décliné en dessin, textile, sculpture. Empreinte de mystères et de cabinets curieux, la Tchèque Jana Sterbak expose son interprétation du conte d’Andersen, La Princesse au Petit Pois. Enfin, la benjamine Berlinde De Bruyckere, artiste belge présentée comme « la digne héritière de Camille Claudel », née exactement un siècle après cette dernière et représentante de son pays à l’actuelle Biennale de Venise, présente quinze sculptures monumentales où l’exploration du corps poursuit sa quête.
Le corps, sa beauté et sa fragilité, la féminité, l’amour, la filiation, la liberté… autant de thèmes qui se croisent pour restituer à Avignon son histoire médiévale. Un autre lien les unit : la matière et la technique. Bronze, marbre, acier, métal, cire, bois, cuir, verre, tissu… Chacune des Papesses prend l’œuvre à bras-le-corps, ne craignant ni la difficulté, ni la complexité.

Nathalie Boisson

(1) 2013 marque à la fois le centième anniversaire de son premier internement et le soixante-dixième anniversaire de sa mort

Les Papesses : jusqu’au 10/11 à la Collection Lambert et au Palais des Papes (Avignon). Rens. http://www.collectionlambert.com/