La fraîcheur du printemps
Une semaine consacrée à la jeune création, c’est toujours une bonne nouvelle. Les Rencontres parallèles 02 annoncent une programmation placée sous le signe de l’échange, à la manière des cercles concentriques.
Les artistes bénéficient des plateaux, mis à leur disposition, pour donner une réalité à leurs envies et finaliser des projets en cours. Lou Colombani, comédienne et co-fondatrice de Last Cie avec Geoffrey Coppini, a lancé ces Rencontres en 2006 au Théâtre Vitez. Depuis, les ambitions ont pris de l’ampleur et l’idée d’une programmation sur plusieurs lieux (Histoire de l’œil, Montévidéo, les Bernardines, la Minoterie et la Compagnie) donne de la consistance et une crédibilité à la jeune création sur Marseille et au-delà des frontières. Pour cette édition, des auteurs et des interprètes venus d’Autriche (Doris Ulrich), de Slovénie (Bojan Jablanovec) et du Portugal (Inês Jacques et Eduardo Raon, Ana Martins) jouent le jeu d’une résidence d’une semaine pour croiser leurs champs d’expression. Il en ressort une programmation aux investigations multiples — jazz, danse, texte, performance —, où la simplicité des moyens déployés résonne avec le décalé, l’improbable et l’irrespectueux. On a longtemps vanté la vitalité du théâtre flamand pour mieux comprendre que l’obscène d’une société où la consommation est le premier moteur de la croissance réside dans les inégalités du partage et le voyeurisme d’une mode qui pousse à envier la femme de son voisin. A partir de là, il devient évident que le théâtre demeure le seul réceptacle à des manifestations quotidiennes où l’on s’épanche sur sa nonchalance, ses humeurs, ses envies de prendre du poids, pour convoquer tout un chacun dans le jeu d’une autre réalité, celle de tous les jours. D’ailleurs, posons-nous sur un banc, si on a la chance d’en trouver un, et regardons bien ce qui se trame autour de nous. Elle fait son marché avec son chien tenant son porte-monnaie dans sa mâchoire. Il urine sur un mur, elle gifle son enfant, il crie sur le feu rouge et, dans un élan communicatif, ils se mettent à klaxonner comme des dingues. On le voit bien, l’improbable et l’invraisemblable se passent dans nos rues et non dans le dernier film d’action, où la violence est une mise en exergue de la plasticité du corps de l’homme, déjouant une machination trop grande pour lui. La force de la jeune création passe, encore et toujours, par le regard acide de notre quotidien et la mise en pièce de nos séries préférées, parce qu’un avis pertinent sur nos blocages, c’est aussi une manière de rire de soi.
Texte et photo : Karim Grandi-Baupain
Rencontres //02 : du 14 au 21/04 dans divers lieux de la ville (voir programmation détaillée dans l’Agenda). Rens. 04 91 92 53 83 / www.komm-n-act.com