A l’heure du dessin, 2e temps au Château de Servières
Servières en papier
Le Château de Servières poursuit la réflexion sur le dessin contemporain instiguée par le Salon Paréidolie. Après un premier volet porté sur la diversité de la création contemporaine en matière de dessin, ce second chapitre — conséquent — s’axe davantage sur la matière même du dessin à travers l’objet de la feuille de papier.
L’exposition s’ouvre littéralement sur une pièce consacrée au travail de Claude Horstmann : le mur en face agit comme une page sur laquelle s’inscrit un gigantesque dessin mural, sorte de pelage tacheté qui occupe la surface et va jusqu’à s’étendre sur un mur alentour. Ces taches apparaissent également comme des renvois à une autre œuvre exposée de l’artiste, une photographie de mots taggués et recouverts de peinture, qui forment eux-mêmes comme des taches inscrites sur le support qu’est le mur de la rue.
L’espace suivant accueille notamment le travail du peintre Antonio Faria : d’imposantes peintures de paysages forestiers conçues en all-over donnent la sensation saisissante de faire face à de véritables empreintes, à mi-chemin entre le photographique et le pictural. Cette impression est due au fait que l’artiste travaille sur le revers du papier, gommant ainsi la touche manufacturée et interrogeant la nature du support de l’image.
Dans la continuité, les œuvres de Sandra Plantiveau s’offrent au public comme différents modules d’un même ensemble. Ainsi, les grands formats papiers à l’abstraction méthodique (les Variations) côtoient quelques pièces d’une série de dessins de tiges (ou de traits…) à la composition travaillée et déclinée. Le tout est complété par l’installation in situ Attraction, où des morceaux de fusain mis bout à bout et spatialisés forment des semblants de tiges/traits qui dessinent, à leur manière, sur le mur blanc de l’espace d’exposition.
Un peu plus loin, on peut découvrir les improbables travaux de Noémie Sauve, dont la recherche plastique se présente sous la forme de compositions alliant aplats de couleurs aux tons organiques et éléments figuratifs de nature végétale ou animale, parfois rehaussés de paillettes et autres matières brillantes. L’ensemble, absurde, frôle la figuration et joue des limites de l’évocation des éléments représentés. Certains d’entres eux, la série des Bicéphales, se voient complétés par des coulures de bronze ou d’étain aux formes résolument organiques, rajoutant à l’incongruité des œuvres et attestant du goût pour l’expérimentation de l’artiste.
L’exposition s’achève sur le travail de Vincent Chenut dont on retiendra l’impressionnante installation in situ qui met en abyme et sublime l’espace d’exposition : la superposition de papiers peints joue comme des strates des différentes identités successives du lieu, que l’intervention de l’artiste se charge de révéler de manière plastique.
En définitive, on verra peu de dessins à proprement parler au cours de l’exposition : cependant, la diversité des pratiques artistiques réunies forme un ensemble fouillé et cohérent qui s’amuse à explorer les différentes possibilités de jeu des artistes dans leur rapport au dessin et à son support.
Estelle Wierzbicki
A l’heure du dessin, 2e temps : jusqu’au 28/02 au Château de Servières (11-19 boulevard Boisson, 4e).
Rens : 04 91 85 42 78 / www.chateaudeservieres.org
Pour en (sa)voir plus : www.pareidolie.net / www.papel-art.com