Un concert de Dionysos est toujours un événement. Afin de fêter comme il se doit le retour des Valentinois sur la scène du Dôme, dans le cadre de la tournée La mécanique du cœur, Ventilo a posé quelques questions décalées à la tête pensante du groupe, Mathias Malzieu, qui ne s’est pas fait prier pour y répondre…
Mathias, tu as chanté « quand j’étais petit, j’étais un Jedi. » Sauf que j’ai vu tous les Star Wars plusieurs fois et que c’est même pas vrai…
Ok, j’avoue, je n’ai jamais été un Jedi… Puisqu’on est dans la confidence, Song for Jedi est moins une chanson sur La guerre des étoiles que sur l’enfance et ses croyances. Comme lorsque tu as l’impression, petit, que tout est possible, en t’inventant des histoires, en te faisant des films, à grands coups d’allers-retours entre rêve et réalité ; avec son lot de fantasmes et de frustrations. Le film m’a juste servi d’illustration, c’est un clin d’œil générationnel.
Tu as déclaré dans la chanson Coccinelle : « Je ne sais pas conduire, pas même un cerf-volant ». Il serait peut-être temps que tu passes ton permis, non ?
Tu ne crois pas si bien dire, je n’ai toujours pas le permis, je sais pas conduire, je préfère me déplacer en skate… Je pense que le fait de ne pas passer le permis participe de mon envie de ne pas grandir, devenir un adulte, c’est tellement chiant d’avoir des responsabilités. J’ai tellement de potes qui ont mal tourné (sourire), qui ont pensé que Sarkozy était la solution à tous leurs problèmes, c’est désolant. Moi, je suis pour la fantaisie à vie, elle devrait être remboursée par la sécurité sociale.
Le leitmotiv « Ta gueule, le chat ! », que tu martèles dans La métamorphose de Mister Chat, a réjouit les membres du C.C.C (Comité Contre les Chats) de Les Nuls. Pourquoi tant de haine envers les félins ?
J’ai toujours eu ce rapport contrasté aux chats, je les adore autant que je les déteste. J’aime leur indépendance, leur façon de se mouvoir, mais je ne supporte pas leur côté hautain, sournois, j’ai l’impression qu’ils passent leur temps à nous juger, contrairement aux chiens. Je rêve d’ailleurs d’avoir un chat avec la mentalité d’un chien, ça serait cool…
Vas-tu revoir ta profession de foi « I feel like John McEnroe » et l’adapter au public marseillais en « I feel like Sebastien Grosjean », par exemple ?
Carrément pas. Je déteste le tennis moderne avec ses joueurs qui font tous deux mètres trente et servent comme des robots. McEnroe’s poetry est plus une chanson sur l’âge d’or de « mon » tennis — celui des Connors, Noah, Lendl, Borg — qu’une simple déclaration d’amour à Big Mac. Ça m’embête de dire que c’était mieux avant, mais à cette époque-là, ce sport était une vraie tragédie grecque. McEnroe n’était pas qu’un gaucher de génie, c’était un artiste émouvant, fragile, profondément humain. C’est en ça qu’il se rapproche d’Eric Cantona…
… Que tu as invité sur l’épilogue de La mécanique du cœur. Lui as-tu demandé au passage pourquoi il avait insulté les sacs à merde en les comparant à Henri Michel, le sélectionneur de l’équipe de France de foot de l’époque ?
Non, je me suis abstenu. Eric Cantona est un de mes héros d’enfance, c’était un honneur pour moi de l’avoir sur le disque, de lui donner des indications en studio. Je ne voulais pas gâcher ce moment en devenant trop curieux ou familier. J’aurais adoré qu’il me raconte toutes ses frasques, mais ça aurait été déplacé. Ça a été une belle rencontre, en tout cas…
Tu as révélé que La petite princesse aux seins écrasés sucrait sa poitrine pour séduire les hommes. Et toi, quelle partie de ton anatomie aromatises-tu de glucose pour être dans la séduction ?
Je me sucre l’esprit (ricanement)… La séduction est à la portée de tout le monde, du moment que tu es gourmand et curieux de l’autre. Sauf si tu as des bras de deux mètres de long ou quatre jambes, je pense que tout le monde est séduisant. Gainsbourg, par exemple, n’était pas un apollon, mais il avait une âme et un charisme qui le rendaient irrésistible.
Tu as fait l’apologie de la Mandarine, ça te tente un duo avec Clémentine Célarié ?
(rires)… Alors, figure-toi que j’ai failli bosser avec elle, il y a quelques années, pour la bande originale d’un téléfilm, mais ça ne s’est finalement pas fait. J’aime beaucoup Clémentine, c’est une femme très attachante, mais si j’avais le choix, je préférerais faire un duo avec PJ Harvey ou Björk.
Tu as déclaré « Gamin, je voulais être conducteur de trains, je suis finalement devenu chanteur de rock », je me suis dit que tu pourrais reprendre The locomotion avec Sylvie Vartan…
L’idée de la reprise est sympa, j’adore la version yéyé de Little Eva, mais la partager avec Vartan, un peu moins… Plus sérieusement, ça me fait plaisir que tu abordes ce sujet, car petit, j’adorais les trains. Un jour, un ami de mon père qui s’occupait du trafic ferroviaire m’a emmené à la gare, donné le clap de départ et donc fait croire que j’avais fait démarrer le train. Ce jour-là, j’ai su que je deviendrais conducteur de train (sourire)…
Tu as baptisé ton précédent opus Munster in love, pourquoi un tel élan de sympathie envers ce fromage ?
Tu devrais revoir tes fiches (rires), c’est Monster in love ! C’est une erreur d’autant plus impardonnable que je déteste le fromage, c’est une véritable phobie. Lorsqu’on me propose un plateau de fromage, j’ai l’impression d’être dans un vestiaire de footeux qui puent des pieds. Quand j’aperçois une fromagerie, je change de trottoir, je suis « fromagophobique »…
Pour finir, je voulais savoir si t’en avais pas marre qu’on te confonde avec Michel Dionysos du Grand Journal sur C+ ?
Ça ne me pose aucun problème (rires), j’ai beaucoup de respect pour Michel Denisot, c’est un très bon journaliste, un mec bien, intelligent, qui s’est d’ailleurs cassé à temps du PSG… On a toujours été bien reçu dans son émission, ça me va.
Propos recueillis par Henri Seard
Photo : Jean-Marc Lubrano
Concert le 16/05 au Dôme.
Dans les bacs : La mécanique du cœur (Barclay)