Mangaro

Mangaro à la Tour-Panorama de la Friche La Belle de Mai

Le Japon lève l’encre

 

Conçue comme un manga (qui se lit à l’envers), l’exposition Mangaro dévoile l’envers graphique et historique du Japon contemporain. Quand le dessin se met au service de la contestation de l’ordre établi…

 

Une fois passé le mur d’images à la fois poétiques et revendicatrices, réalisé en direct par certains des artistes lors du vernissage, Mangaro prend des allures de mille-pattes éditorial et graphique. Un chemin d’illustrations serpente sur plusieurs dizaines de mètres avant de dévoiler la tête de cet insecte génialement foutraque. Une explosion de livres, vidéos, impressions en sérigraphie et objets tous dédiés à l’underground graphique japonais. Grâce à la collection du journaliste Claude Leblanc et à la faveur d’un séjour au Japon en 2010, la rencontre de Pakito Bolino, éditeur du Dernier Cri, avec Ayumi Nakayama des éditions Taco Ché, a fait émerger l’idée de cette exposition. Plusieurs allers-retours Marseille-Tokyo plus tard, l’idée prend corps. Non pas une mais deux expositions voient le jour : Mangaro à Marseille et Heta-Uma à Sète. Avec plus d’une quarantaine d’auteurs représentés et sept maisons d’édition, l’événement s’avère incontournable pour qui prétend, à tort, connaître la culture japonaise. Point de départ de l’exposition, le magazine underground Garo (1964-2002) a été le réceptacle des mouvements contestataires japonais face à l’alliance faustienne du Japon avec les Etats-Unis. Après avoir atteint 80 000 exemplaires tirés à la fin des années 60, Garo devient lors de la décennie suivante le vecteur d’un nouveau style graphique : le heta-uma, littéralement « mal fait bien fait » ou « sale mais beau ». A la liberté scénaristique s’ajoute la créativité visuelle, en lutte contre l’esthétique léchée de la culture japonaise de l’époque. Une facette populaire et méconnue du Japon apparaît en tournant les pages du magazine. Une autre histoire du Japon tout simplement, à travers des auteurs emblématiques comme Shirato Sanpei, Tsuge Yoshiharu, ou encore Nagashima Shinji. Le tour de force de Pakito Bolino est d’avoir mis côte à côte l’ancienne génération de mangakas avec sa relève, que l’on trouve chez des maisons d’édition comme AX ou Mograg. Chose improbable au pays du soleil levant, où certains codes ancestraux sont encore de mise.

 Guillaume Arias

 

Mangaro : jusqu’au 01/02/15 à la Tour-Panorama de la Friche La Belle de Mai (41, rue Jobin, 3e).
Rens : 04 95 04 95 95 / www.lafriche.org

Pour en (sa)voir plus : www.cartel-artcontemporain.fr/evt/mangaro-heta-huma