Mélanie Terrier, Minori Matsuoka & Anne-Charlotte Depincé à Vacances Bleues
Tournez manège
Depuis mardi, les locaux de Vacances Bleues accueillent la bien nommée exposition Les belles au bois dormant. Trois femmes, trois jeunes artistes et autant de propositions, présentent leur travail : l’occasion de partager les doux rêves éveillés de Mélanie Terrier.
Plongée par une fée dans un long sommeil, le belle princesse attend le baiser libérateur du prince charmant… De Perrault à Disney, ce conte a bercé des générations de petites filles et a fini par s’inscrire irrémédiablement dans notre inconscient collectif. On pense évidemment à cela en observant l’installation Un jour de Mélanie Terrier. Sur une table, une petite boîte noire, entrouverte. En se penchant, on remarque une ouverture, circulaire comme un œillet. Au fond de la boîte : un écran vidéo. Sur fond noir apparaît une jeune fille, filmée en plongée. Elle tourne sur elle-même. Lentement, une mélodie s’échappe, on discerne les paroles « Un jour mon prince viendra… » qui, comme la jeune fille, tournent en boucle. Le personnage se démultiplie alors, l’écran s’emplit de jeunes filles qui semblent hantées par cette même attente. Subtilement, elles se mettent à tourner dans l’autre sens, et la musique passe à l’envers. Nous restons pourtant durablement marqués par cette ancienne mélodie. Disparition successive des jeunes filles. Le petit écran redevient noir. Fin du manège. Cette installation illustre parfaitement le travail de Mélanie Terrier : la femme comme sujet, le noir et le blanc comme couleurs, dans une absence totale de décor, le moment semble suspendu, les mouvements se répètent, et dans cette parenthèse d’espace et de temps, l’artiste interroge notre mémoire et notre imaginaire. Même lorsque l’image est fixe, comme les magnifiques photographies Morphée et Blanche, il y a toujours une forme de mouvement, une impression de profondeur. Plus que dans le surréalisme, cette jeune artiste marseillaise semble inscrire son geste dans une sorte de romantisme onirique et nostalgique. La forme des supports joue aussi un rôle important : images rondes ou ovales, projection d’une vidéo sur un écran circulaire, la beauté organique du cadre participe aussi de l’harmonie d’ensemble. La boucle, celle des cheveux, de la musique ou du cadre, s’inscrit alors en filigrane dans un processus de re-création d’un temps immémorial que l’on regrette sans l’avoir vraiment connu. Plus que des formes, l’art crée ici du rêve.
nas/im
Mélanie Terrier, Minori Matsuoka & Anne-Charlotte Depincé : jusqu’au 16 mai à Vacances Bleues (60 rue St-Jacques, 6e). Rens. Château de Servières : 06 64 76 74 50