Millenium – (Danemark/Suède – 2h33) de Niels Arden Oplev avec Michael Nyqvist, Noomi Rapace…
Déjà mort…
Millenium, le film, pose la question de l’adaptation du best-seller et de son prolongement cinématographique. Pour celles et ceux qui lisent peu, le cinéma reste le meilleur moyen de découvrir le fil d’une histoire qui captive le plus grand nombre et devient une contagion en soi. Millenium, c’est le nom d’une revue où travaille le journaliste Mikael Blomkvist, spécialiste des affaires financières. Un jour, un homme d’une grande famille au passé trouble (des accointances avec les nazis) lui demande d’enquêter sur la disparition de sa petite fille. Le travail d’investigation devient un moteur de recherche au sens propre, par la grâce de Google et de Macintosh. Le corps réfléchit et pense, plus qu’il ne court. L’espace cinématographique devient un champ contrechamp avec l’écran et le clavier. Il y a un fort penchant autobiographique dans cette œuvre, l’auteur du livre, Stig Larsson, étant lui-même un ancien journaliste, décédé d’une crise cardiaque en 2004. Le corpus cinéma introduit une nouvelle façon de filmer le XXIe siècle par écran interposé et le personnage secondaire Lisbeth Salander, jeune fille perturbée, ne sert qu’à illustrer la reconstruction du puzzle. Internet est une source infinie où tout se lie dans le désordre et plus ça dure, plus on avance vers le but recherché : tenir le spectateur en haleine pendant deux bonnes heures. Ce qui pose problème, c’est la chorégraphie du corps dans l’espace cinéma. Ici, le passage de l’introspection à la course-poursuite est un copier-coller où la réalité du geste disparaît sous l’emprise du poids de l’œuvre. On n’ouvre pas les portes avec une clef, on ne prend jamais de douche. On passe au lit pour fumer une cigarette après la baise. On ne prend jamais le temps d’un petit-déjeuner et tout devient un gigantesque labyrinthe sur les affres du passé.
Karim Grandi-Baupain