Le Monde tel qu’il va ! au MJ1
Expo avec vue
Session de rattrapage pour les aficionados de la photographie ! Le J1, géant de béton et d’acier, a rouvert ses portes pour accueillir Le Monde tel qu’il va !, une sélection de huit expositions qui ont marqué l’édition 2017 des Rencontres de la Photographie d’Arles.
Après une longue période d’abandon depuis MP 2013, le hangar J1 retrouve ses lettres de noblesses en accueillant dans ses quelques 4 000 mètres carrés une exposition hors les murs du festival arlésien mondialement reconnu. Un site de choix situé dans le quartier en reconquête d’où sortent de terre les nouveaux spots emblématiques de la cité phocéenne depuis quelques années : le Mucem, les Terrasses du Port, les Docks, les Voûtes de la Major… Une réouverture grandiose pour un ex haut lieu industriel marseillais datant des années 30 et qui a été conçu par la Société Eiffel. L’association MJ1 a ainsi ouvert ses portes à une exposition qui devrait ravir les Marseillais jusqu’en janvier prochain.
Scénographie inédite, vue sur mer et entrée libre : Le Monde tel qu’il va ! a de quoi impressionner. Si la sélection s’avère très engagée, elle n’en reste pas moins esthétiquement remarquable. Le hangar marseillais évoque, comme un écho qui n’aurait pourtant pas perdu d’énergie, l’ambiance du Parc des Ateliers ou de l’Atelier des Forges d’Arles. De quoi se (re) plonger instantanément dans l’atmosphère bouillonnante et imagée du festival. On y retrouve notamment Mathieu Asselin et son commissaire d’exposition Sergio Valenzuela Escobedo avec une enquête troublante sur le géant américain Monsanto. La thématique environnementale est également reprise dans la série Un Monde qui se noie de Gideon Mendel (commissariat de Mark Sealy), qui a immortalisé des inondations aux quatre coins de la planète en se focalisant sur l’impact de ces catastrophes du point de vue de l’humain. Une mélancolie douce se dégage paradoxalement de ces clichés, qui dévoilent la vulnérabilité de l’individu touché par les changements climatiques.
Cette programmation géopolitique nous invite également en Afrique avec The Dynamics of Dust (Philippe Dudouit) et Fifty-Fifty (Samuel Gratacap), deux études photographiques respectivement en zone sahelo-saharienne et en Lybie qui ne laisseront personne indemne. Avant de se rendre à Chypre avec Monique Deregibus et sa série La Maison Chypre, on ne manquera pas de faire un détour en Turquie (Brave New Turkey) pour se laisser conter l’architecture néo-ottomane des nouvelles mosquées d’Ankara et Istabul : un travail documentaire brillant de Norman Behrendt (commissariat de Markus Hartmann).
La France n’est pas non plus épargnée par les interrogations sur l’état du monde, comme en témoigne l’Utopie pavillonnaire de Levitt France (Julie Balagué, Vincent Fillon, Bruno Fontana, Jean Noviel, Camille Richer). Un registre bien plus léger mais qui force la réflexion sur nos sociétés modernes standardisées.
Enfin, la tornade La Vuelta, accompagnée des onze projections d’histoires colombiennes du programme Oh ¡ Latina !, nous plonge dans une danse effrénée en pleine Colombie. 27 photographes et artistes colombiens se sont associés pour cette série haute en couleurs retraçant les mutations diverses et immenses du pays, entre fête, violence et croyances. Une série dynamique d’où se dégagent certaines pépites : Alberto Baraya et son Herbário de plantas artificiais ou encore Juan Manuel Echavarria, dont la série Silencios laisse sans voix.
Une véritable piqûre de rappel qui replonge le spectateur en plein été, dans le temps fort des Rencontres d’Arles. Il ne manque que les cigales et la chaleur étouffante des ruelles arlésiennes tant l’atmosphère du J1 se prête bien à l’évènement. Dommage que les verrières, qui dévoilent pourtant une vue splendide sur la mer, se reflètent un peu trop sur les photographies. Cela ne laisse néanmoins aucune excuse pour rater cette exposition phénoménale.
Astrid Börner
Le Monde tel qu’il va ! : jusqu’au 7/01 au MJ1 (4982 quai de la Joliette / Boulevard du Littoral, 2e).
Rens. : www.mj1.fr