Parcours L’Art à l’endroit à Aix-en-Provence
Aix situ
Sous la houlette de Xavier Douroux, ancien directeur artistique de la Fondation Vasarely (grande laissée pour compte de 2013), et Anne Pontégnie, commissaire émérite, onze stars internationales disséminent leurs œuvres dans Aix-en-Provence, histoire de remettre L’Art à l’endroit.
Samedi 12 janvier : sous les couleurs « bleu blanc rouge » de la Patrouille de France (sic), l’année « Capitale » s’ouvre à Aix-en-Provence. Plan en main, le public découvre alors le parcours d’art contemporain L’Art à l’endroit. Une chasse au trésor qui fédère un public en baguenaude, et questionne peut-être plus le regard que l’œuvre elle-même.
Depuis l’émergence d’une féroce volonté de démocratiser l’art contemporain, on voit fleurir un peu partout des biennales et des foires pour les professionnels de la profession et des parcours d’art contemporain pour néophytes. Cette nouvelle forme d’exposition revêt plusieurs avantages « politico-socio-culturels » non négligeables. En s’installant aux quatre coins de la rue, l’art s’impose au passant, le dispensant du désir de voir et de se rendre de son propre chef au musée. Reste à espérer que la visite de ces « expositions-parcours » permette au quidam de retirer plus qu’une belle image de la ville…
Mais ne boudons pas notre plaisir et jouons le jeu en 2013, on se posera ces questions-là plus tard… D’autant que l’on peut faire confiance aux deux commissaires, garants d’un « événement » de qualité. Le parti pris curatorial de Xavier Douroux et Anne Pontégnie propose une réflexion sur les « lieux de vivre ensemble » et tente précisément de se défaire de cet aspect événementiel pour ramener le propos à des questions de cohérence entre l’œuvre et « l’endroit » où elle intervient. Pour les artistes, tout l’enjeu est donc d’échapper au côté « belles images ».
En extérieur, l’œuvre d’art souffre d’un rapport aux proportions et à l’environnement que le white cube annihile automatiquement. L’œuvre de Kusama évite intelligemment cet écueil et réinvente le légendaire cours Mirabeau avec son image de carte postale, en lui insufflant une contemporanéité alliant à la fois esthétique et réflexion sur les transformations de nos paysages traditionnels. Si, le temps d’une exposition, elle emmène le visiteur dans un monde parallèle, Kusama perturbe les habitudes et les regards figés sur notre patrimoine. Cette image stéréotypée de la Provence qui semble encore appartenir au XIXe siècle a sûrement aussi inspiré l’œuvre de Rachel Feinstein, Puritan’s Delight, une calèche accidentée, échouée dans la fontaine de la Rotonde. Conduit par une vision entre modernité, histoire et « rétromanie », Mark Handford a utilisé le fer à cheval comme signe et forme de sa sculpture installée dans les nouveaux quartiers commerciaux aixois (les Allées provençales), intégrant les nouvelles nécessités de l’urbanité en mélangeant les genres de l’art et ceux du mobilier urbain. Le même cheminement de pensée motive l’œuvre de Xavier Veilhan dans la cour de l’Hôtel de Ville. L’artiste y a installé un monument non pas aux morts mais aux vivants, à qui l’on offre la possibilité d’intégrer l’œuvre. Un peu plus loin sur la place du Musée Granet, l’arbre d’Ugo Rondinone semble loin des tergiversations du commissariat et s’épanouit dans une poésie bien connue de l’artiste, en s’imposant dans le décor avec ses proportions majestueuses et son blanc éclatant… A la Cour d’Appel, Sofia Taboas montre deux cages qui rappellent les ferronneries d’art des balcons de la ville. Les deux prisons entrent ainsi en dialogue avec le lieu et ses fonctions judiciaires, à l’instar du travail de Franz West au Palais de Justice, dont les trois sculptures semblent personnifier le juge, le prévenu et l’avocat. Le parcours continue à travers toute la ville et au-delà (jusqu’à l’Abbaye de Silvacane) avec, entre autres, les œuvres de Thomas Houseago, Marc Camille Chaimowicz, Huang Yong Ping, et Kimsooja… Autant d’œuvres qui nous prouvent à quel point vous nous aviez manqué, Monsieur Douroux…
Céline Ghisleri
Parcours L’Art à l’endroit : jusqu’au 17/02 à Aix-en-Provence (Fontaine de la Rotonde, Place François Villon, Mausolée Joseph Sec, Place de l’Université, façades de la ville, Cours Mirabeau, Pavillon Vendôme, Grand Théâtre de Provence, Place Saint Jean de Malte, Cour d’Appel, Cour de l’Hôtel de Ville, Palais de Justice et Abbaye de Silvacane).
Rens. www.mp2013.fr/evenements/2013/01/lart-a-lendroit-un-parcours-dart-contemporain-a-aix-en-provence/