Pierre Alechinsky au Musée Granet

Pierre Alechinsky au Musée Granet

De CoBrA à PACA

Inspiré par le Sud, Pierre Alechinsky présente au Musée Granet un choix de plus de trente ans d’activité expressionniste. Une œuvre cohérente qui, depuis sa participation au sein du mouvement artistique CoBrA, n’a pas perdu de sa vivacité ni de sa poésie picturale.

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Au lendemain de la deuxième guerre mondiale, l’avant-garde artistique (issue des milieux artistiques de Copenhague, Bruxelles et Amsterdam, d’où le nom de CoBrA) serpenta brièvement autour d’une démarche favorisant le retour à des formes primitives. « Le travail d’Alechinsky combine la leçon de l’automatisme surréaliste, de la spontanéité de CoBrA avec celle des maîtres de la calligraphie chinoise », écrit justement Catherine Plassart. Sa trace s’avère donc reconnaissable car elle est l’agencement d’une écriture directe : de son passé d’étudiant (en imprimerie et typographie) et de graveur, l’artiste belge a conservé un trait fluide à l’encre. Il fixe, sur papier marouflé ou sur porcelaine, des courbes récurrentes. Le livre est omniprésent : la série des Livres infeuilletables en grès tranche par sa sobriété. Illustrateur (entre autres des éditions PAB), il distille un humour grinçant en personnifiant et en graffitant des archives notariales, des écritures du XIXe siècle ou des cartes d’Atlas… A l’opposé d’un Baselitz (qui privilégie la figure de la chute), Alechinsky est un peintre de la verticalité ou de la montée enthousiaste : même les châssis rectangulaires académiques se développent chez lui comme une farandole de signes. Une image centrale, aux pourtours souvent investis par des vignettes qu’il nomme « remarques marginales », s’éclaire ainsi d’un nouveau jour. Un parcours dans un discours qui se multiplie : on pourrait le taxer de bavardages, mais pourtant il ne s’agit pas de logorrhées. En effet, la magie du dosage entre les zones de couleurs et le noir et blanc fait, par cette juxtaposition, des toiles à l’équilibre virevoltant. Cette dynamique est contrebalancée par l’apaisement du spectateur : on est face aux compositions d’Alechinsky comme un lecteur séduit par une couverture géante qui serait la planche-contact de tout un recueil. Il faut alors se poser, observer les bandes dessinées qui se déploient et accepter de n’en comprendre que des bribes, d’en embrasser le rythme. Depuis les années 90, l’artiste privilégie le format et la « Portée circulaire » (1990-1997) : des sortes de « mandalas » (estampages de banc et de plaques d’égout !) de toute beauté viennent ponctuer les deux dernières salles de l’exposition, véritable chant à la solarité de notre région.

Marika Nanquette-Quérette

Alechinsky, Les ateliers du Midi
: jusqu’au 3/10 au Musée Granet (Place Saint-Jean de Malte, Aix-en-Provence). Rens. www.museegranet-aixenprovence.fr