Makoza effet
Loin du star system, Ksir Makoza signe Blackout, un premier album rageur et efficace. Encore trop méconnu malgré ses apparitions tonitruantes dans l’émission Talent Street, il compte sur la scène pour séduire un public de plus en plus nombreux.
Il est 16h, Ksir Makoza sort de l’Affranchi après une séance de travail intense, destinée à parfaire son jeu de scène en vue des concerts à venir. A trente-six ans, le Marseillais vient de sortir Blackout, son premier album solo. Il y dépeint le carcan d’une société sur laquelle il n’a pas de prise, sur un flow rageur mais maîtrisé, posé sur les rythmes hip-hop de Fuego Star, son fidèle beatmaker et ami. Blasé par les incohérences du système, il en pointe les côtés sombres mais ne prétend pas apporter de réponses. Chacun à sa place, la sienne est sur scène. C’est là que le public peut mesurer l’envergure de ce passionné de rap U.S. Une énergie qui emporte tout sur son passage, nous libérant, le temps d’un concert, de ces chaînes qui nous entravent.
Vainqueur du tremplin Buzzbuster, et plus récemment finaliste de l’émission Talent Street sur France O où JoeyStarr, alors membre du jury, lui a témoigné un vif intérêt, comment expliquer le manque de visibilité d’un tel artiste ? C’est avec un brin de déception, une dose d’humilité et beaucoup de philosophie qu’il s’en explique : « J’ai peut-être raté le bon train à une période où j’aurai dû mettre le paquet comme je le fais aujourd’hui. Mais honnêtement, je me sens à part dans le rap français. Il y a un même flow pour mille rappeurs, et ce sont ceux-là qui passent en radio. Aucune maison de disque ne veut produire mon album ? Tant pis, je monte mon label et je continue à faire ma musique comme je l’entends. J’ai au moins ce privilège. »
Un esprit positif qui se traduit aussi dans ses textes. « J’ai une écriture instinctive. Je dénonce certaines choses, mais je parle aussi de ce que j’aime de la vie, comme les soirées entre potes, le poker, la fête. » En effet, derrière une apparence bourrue, le gaillard est souriant, se confie facilement, et laisse entrevoir l’épicurien qui est en lui. Mais rapidement, sa conscience reprend le pas : « Le plus dur est de profiter de ces instants sans entrer dans une routine face à laquelle nous ne devons pas nous résigner. Je m’y surprends moi-même des fois, alors que je déteste cette attitude. Au-delà de la référence à Method Man & Redman, c’est cela que signifie Blackout. »
Laurent Jaïs
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