Quand la nature s’en mêle au Musée des enfants de la Ville de Marseille / Préau des Accoules
Vacances à l’Accoules
Alors que viennent de débuter les vacances de printemps, et qu’il ne fait pas encore assez chaud pour aller à plage toute la journée avec ses bambins, Ventilo vous propose de les occuper intelligemment pendant ces congés printaniers en les emmenant au Préau des Accoules. Visite en compagnie de la responsable du Musée des enfants de Marseille et de quelques minots curieux.
Accolé à une école primaire, le Musée des enfants est installé au Préau des Accoules, en plein cœur du Panier, dans un bâtiment classé, l’ancien Observatoire de Marseille, construit en 1702 par les Jésuites, et plus particulièrement dans la salle de cérémonie dessinée en 1783 par Esprit-Joseph Brun pour l’Académie des Sciences, des Arts et Belles Lettres.
« Nous nous sommes battus pour que le bâtiment soit classé : la grande salle avec sa voûte plate est un chef d’œuvre architectural ! », explique Soria Makti, sa responsable et commissaire d’exposition depuis 2015, le musée existant quant à lui depuis 1992 à l’initiative de Christian Poitevin, l’adjoint à la Culture de l’époque.
Le concept très original propose un espace de « sensibilisation aux arts et au patrimoine » en programmant une exposition thématique destinée aux enfants de cinq à douze ans, renouvelée chaque année scolaire, et qui met en avant des œuvres d’art issues des collections des autres musées marseillais, le tout avec un dispositif ludique. Et entièrement gratuit !
« Ce Musée des enfants donne la possibilité aux petits d’avoir des clefs de compréhension du monde de l’art, avec des œuvres accrochées à hauteur d’enfants, et un discours fluide et accessible. Cela permet également aux enfants qui n’accèdent pas spontanément aux musées avec leurs familles de venir avec leurs écoles. Nous prônons une démocratisation de l’art pour tout.e.s ! […] Nous pouvons proposer un contrepoint d’une grande exposition qui aurait lieu dans un autre musée, comme cela a été le cas avec l’exposition L’Orientalisme à la Vieille Charité que nous avons accompagnée avec l’exposition L’Orient en tapis volant au Préau. Sinon, nous sommes libres de nos thèmes selon l’inspiration ou l’actualité. »
En mettant en exergue une citation du peintre Francis Bacon — « L’art, c’est l’homme ajouté à la nature » —, l’exposition du moment, Quand la nature s’en mêle, est donc consacrée au vivant. « Ce thème me tenait particulièrement à cœur pour rendre grâce à cette superbe Dame Nature et en même temps pour que les enfants prennent conscience de cette fragilité dans laquelle se trouve notre planète. »
La visite se déroule en deux temps. Tout d’abord, l’accueil des enfants se fait dans une première pièce consacrée à l’Égypte antique, présentant des objets usuels ou traditionnels liés à l’art et à la nature. En préambule, la médiatrice rappelle aux enfants, assis par terre sur des coussins, et dont cette visite constitue pour la plupart d’entre eux la première expérience dans un musée, qu’il ne faut pas toucher les œuvres car un musée est là pour les montrer mais aussi les protéger.
Vient ensuite une présentation de la thématique du moment. « Les êtres humains font partie de la nature, qui nous est indispensable pour vivre, respirer, manger… », introduit la médiatrice.
Mais il est déjà temps de passer à la deuxième salle, la pièce principale avec son magnifique plafond soutenu par de non moins splendides colonnes. Cette salle majestueuse présente de façon aérée (malgré une scénographie un peu chiche tout de même) aussi bien des toiles que des objets usuels, comme des soupières en forme de chou ou des figurines en céramique symbolisant les quatre saisons. Pour le printemps, il s’agit de la déesse romaine de la terre Flora, que l’on retrouve également représentée sur une toile de Carlo Loth, un peintre baroque bavarois. Toile à propos de laquelle la médiatrice avoue aux jeunes visiteurs : « Flora, elle me fait peur », avant de poursuivre : « On n’est pas obligé de tout trouver beau dans un musée », promouvant une vision décomplexée de l’art tout en montrant aux enfants qu’ils peuvent se forger ainsi un jugement propre, ce qui est aussi le rôle du musée et de l’art en général.
Sont également exposées deux natures mortes qui permettent à la médiatrice d’approfondir le côté participatif de la visite en faisant deviner aux enfants les objets représentés sur les toiles, dont l’une est signée par le peintre flamand du XVIIe siècle Jan van Kessel qui y compose une allégorie des quatre éléments, thématique directement en relation à la série de six petites peintures de l’artiste surréaliste Victor Brauner, dont celle représentant le feu est reprise sur l’affiche très réussie de l’expo.
S’inspirant de ses rêves, ce peintre surréaliste français d’origine roumaine crée des formes anthropomorphiques et zoomorphiques, deux termes « compliqués » d’après la médiatrice qui n’hésite cependant pas à les utiliser, partant du principe que les enfants s’en rappelleront peut-être plus tard… et faisant ainsi encore œuvre de pédagogie.
La première partie de la visite s’arrête là, même si il reste trois œuvres non présentées, dont l’installation de l’artiste italien Giuseppe Penone.
Après de rapides explications sur les nombreux jeux mis à disposition des enfants, que ce soit une plaque aimantée et fixée au mur avec des formes pour créer des personnages et figures à la manière de Brauner, des puzzles pour reconstituer la toile de Flora ou les natures mortes, des memorys sur l’Égypte antique ou des mots croisés pour les plus grands, les enfants ont encore une heure pour s’amuser !
Le Musée des enfants crée ainsi, sans pour autant utiliser de technologie moderne (comme les écrans), un côté interactif et ludique. « On assimile, plus en étant acteur, l’interaction est primordiale pour marquer les enfants. […] Tout est fait pour qu’ils n’aient aucune difficulté de compréhension, et surtout c’est un espace ludique où on s’amuse en apprenant plein de nouvelles choses. L’autre jour, une enfant m’a même dit que quand elle sera grande, elle voulait être elle aussi conservatrice de musée ! C’est touchant », s’émeut Soria Makti.
À noter qu’un très intéressant livret ludique est aussi mis à disposition pour prolonger la visite.
Alors vous aussi, courez découvrir ce superbe musée, qui accueillera dès septembre une nouvelle exposition : « Marseille, une histoire d’amour mettra à l’honneur les artistes qui sont nés ou se sont installés à Marseille, comme le sculpteur Pierre Puget, ou plus près de nous César, et qui contribuent à faire le renom de cette ville. Marseille, on l’aime parce qu’on y est né ou par adoption. Un peu comme dans le mythe sur sa naissance qui est due à l’histoire d’amour entre Gyptis et Protis ! »
JP Soares
Quand la nature s’en mêle : jusqu’au 7/07 au Musée des enfants de la Ville de Marseille / Préau des Accoules (29 Montée des Accoules, 2e).
Rens. : 04 13 94 83 85 – resa-preaudesaccoules@marseille.fr – musees.marseille.fr/musee-des-enfants-preau-des-accoules-0