Renaissance – Animation (France – 1h35) de Christian Volckman
C’est avec impatience qu’on attendait ce premier film d’animation en 3D, porteur de belles promesses : son réalisateur sorti de la prestigieuse Ecole supérieure d’arts graphiques Penninghen avec un premier court métrage couvert de prix internationaux, une technique d’animation novatrice… (lire la suite)
Marques attaquent
C’est avec impatience qu’on attendait ce premier film d’animation en 3D, porteur de belles promesses : son réalisateur sorti de la prestigieuse Ecole supérieure d’arts graphiques Penninghen avec un premier court métrage couvert de prix internationaux, une technique d’animation novatrice… Captivantes, les premières images le sont en effet. La constitution d’un univers futuriste où Paris en 2054, tout en conservant ses limites et bâtiments actuels, a crû en hauteur et en profondeur, projette le spectateur dans une mégapole à la fois familière et inquiétante. La ligne haussmannienne du Paris actuel a été conservée, mais recouverte d’excroissances architecturales technoïdes. Le noir et blanc très expressionniste évoque même parfois les premiers Lang, Métropolis pour l’aspect tentaculaire et déshumanisé et M le Maudit pour la sourde menace qui pèse en permanence sur les personnages. Pourtant, à mesure que l’intrigue avance, la magie s’évanouit, et le spectateur peine à s’intéresser aux péripéties de l’action. Karas, un flic aux méthodes efficaces quoique pas toujours orthodoxes, est chargé de retrouver Ilona Tasuiev, jeune biologiste prodige. Le vice-président de la firme Avalon, pour laquelle Ilona travaille, est prêt à tout pour la retrouver car la jeune femme a découvert un protocole qui met en jeu l’avenir de l’humanité… Les personnages restent très stéréotypés : Karas est un ancien mafieux entré dans la police, il tombe évidemment amoureux de Bislane, danseuse brune d’une boîte mal famée, tout aussi sexy que sa blonde sœur scientifique Ilona. Quant à Paul Dellenbach, l’affreux vice-président d’Avalon (une multinationale de la beauté qui fait beaucoup penser à une marque actuelle), il est réduit à son âpreté au gain et à sa sournoiserie. Au fond, nous n’avons pas affaire à des personnages de cinéma mais à des masques, et non pas à une idée originale mais au même scénario, cent fois rebattu, dont Renaissance ne constitue qu’une des nombreuses variantes. Le sentiment de déjà-vu se voit encore accentué par un doublage calamiteux, qui met à mal les nuances et les émotions ; sans compter que la voix de certains personnages correspond difficilement à leur rôle : la procureur, sorte de Fantomette à lunettes, est ainsi affublée d’une voix de petite fille peu crédible. Tant et si bien qu’à la fin, on se désintéresse de l’histoire, et qu’en sortant de la salle, on a l’impression d’avoir vu un téléfilm. Impression renforcée par la réapparition, parsemée tout au long du film, de publicités pour la Fnac, qui fêterait ses cent ans en 2054. La déception nous étreint alors, au souvenir de ces images magnifiques. Et une question se pose : le coût technologique de ce film était-il tel qu’on ne puisse éviter d’en faire un spot publicitaire ? On se sent floués, comme si les marques de 2006 (le héros roule en Citroën et échappe à un assassinat dans les Galeries Lafayette), dont rien ne dit qu’elles seront toujours présentes en 2054, avaient transformé notre désir de spectateur de cinéma en temps de cerveau humain disponible. On n’en attend pas moins de TF1, on attendait mieux de Renaissance.
Mélanie Rémond